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12 avril 2020 7 12 /04 /avril /2020 15:24

Qui a vu quelquefois un grand chêne asséché,
Qui pour son ornement quelque trophée porte,
Lever encore au ciel sa vieille tête morte,
Dont le pied fermement n’est en terre fiché,

 

Mais qui dessus le champ plus qu’à demi penché
Montre ses bras tout nus et sa racine forte,
Et sans feuille ombrageux, de son poids se supporte
Sur un tronc nouailleux en cent lieux ébranché :

 

Et bien qu’au premier vent il doive sa ruine,
Et maint jeune à l’entour ait ferme la racine,
Du dévot populaire être seul révéré :

 

Qui tel chêne a pu voir, qu’il imagine encore
Comme entre les cités, qui plus florissent ore,
Ce vieil honneur poudreux est le plus honoré.

 

 

 

 

Joachim du Bellay

Antiquités XXVIII

1558

 

 

qualis frugifero quercus, sublimis in agro
exuvias veteris populi sacrataque gestans
dona ducum, nec jam validis radicibus hærens
pondere fixa suo est ; nudosque per aæra ramos
effundens trunco, non frondibus,, efficit umbram,
et, quamvis primo nutet casura sub Euro,
tot circum silvæ firmo se robore tollant,
sola tamen colitur.

 

Tel un grand chêne dans une campagne fertile portant les dépouilles d’un peuple antique et les dons consacrés par les généraux. Il n’est plus soutenu par de solides racines, il tient uniquement par son poids tout en répandant ses branches nues dans le ciel. Son ombre ne provient que de son tronc et non de son feuillage. Mais quoiqu’il vacille, qu’il soit prêt à tomber au premier souffle de l’Eurus et que tant d’autres arbres vigoureux l’entourent, il est le seul qui soit honoré

 

LUCAIN ? Pharsale I, 135-142

 

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