Je reviens d’un court voyage à Rome et en Toscane. La pluie (la pioggia) avait envahi le Campo de Sienne et il n’y avait plus de vendeurs d’imperméables à usage unique à mille lires. La pioggia est comme la pasta, une spécialité de l’Italie. Lorsque nous circulons sur une autoroute sous une pluie battante, c’est à Fellini que nous pensons. Quand il n’y a pas d’aqua alta à Venise, l’Arno sort de son lit et envahit Florence comme en décembre 1966 martyrisant le Christ de Cimabue dans la Basilique de Santa Croce ; et l’œuvre a beau être restaurée, elle garde toujours des cicatrices indélébiles.
Ce n’est pas la seule œuvre qui a souffert à Florence. Dans la Basilique de Santa Maria del Carmine, les restaurateurs ont retiré le feuillage qui couvrait les parties génitales d’Adam et d’Eve (1) chassés du Paradis terrestre, admirable fresque de Massacio. On ne connaît pas le peintre auteur de ce feuillage cache-sexe. Mais on sait que le censeur de la Création du monde de Michel-Ange de la Sixtine était surnommé il Braghettone. Il s’était spécialisé dans la réalisation des feuilles de vigne.
Dans d’innombrables églises, nous trouvons d’admirables fresques : Massacio à Santa Maria del Carmine ou à Santa Maria Novella, Fra Angelico au couvent de San Marco. Fra Angelico avait déjà dans ses peintures intégré le paysage toscan et avait déjà découvert intuitivement la perspective. Je ne suis pas sensible à l’énorme cathédrale avec les portes de bronze.
Dans les rues de la ville, il y a plus de touristes que de toscans et il est difficile de rencontrer quelqu’un qui puisse nous guider dans nos itinéraires.
Avant d’avoir fait des voyages en Italie, un ami de mes parents me disait en parlant de ce pays : « C’est un pays extraordinaire, mais attention, tu peux très bien être déçu de prime abord, car les monuments que les guides te recommandent, nous les connaissons tous, nous les avons trop vus dans nos livres d’histoire. Ne te contente pas de suivre à la lettre le guide bleu. Regarde le pays dans son ensemble ! » Eh, je pensais que beaucoup de voyageurs font ce que Julien Gracq appelle du tourisme de validation.
Jean-Pierre Bénisti
Le guide du routard peut être utile, mais avant de partir en Toscane,, mais surtoutil faut lire : Le chapitre consacré à Florence dans l’Histoire de l’Art d’Élie Faure
Le Désert d’Albert Camus in Noces, Collection Folio Gallimard.
Le Voyage du Condottiere de André Suarès, éditions Granit, 1993
(1)Voir : Les couilles d’Adam
http://lunettesrouges.blog.lemonde.fr/2007/10/27/les-couilles-dadam/