Le 23 novembre 1961, Maurice Perrin, militant de la Trève civile d'Albert Camus, était assassiné à Alger par un commando de l’OAS. Dans ce climat de guerre civile qui régnait à Alger à la veille de l’indépendance, l’organisation terroriste entreprenait son vaste travail de suppression physique des personnes susceptibles de construire des ponts entre les diverses communautés. Et c’est ainsi que des avocats comme Maître Popie, des fonctionnaires comme Alfred Locussol, des militants socialistes comme William Lévy des instituteurs comme Noël Linarès, et plus tard les inspecteurs des Centres sociaux comme Salah Ould Aoudia, Max Marchand et le célèbre écrivain Mouloud Feraoun furent les innocentes victimes d’un terrorisme imbécile.
Maurice Perrin avait été le condisciple d’Albert Camus au lycée d’Alger en hypokhâgne
Sur la photo célèbre de la classe d’hypokhâgne du lycée Bugeaud (Emir Abdelkader aujourd'hui), on reconnaît au centre Monsieur Paul Mathieu, professeur de français, Monsieur Sauvage, proviseur, Monsieur Garoby, professeur d’histoire et géographie et Évelyne Izac (future Evelyne Baylet, mère du ministre Jean-Michel Baylet) Au deuxième rang, à l’extrême droite, Jean Bogliolo, et de droite à gauche André Bélamich, une étudiante inconnue et Claude de Fréminville (futur Claude Terrien) , derrière le proviseur. Toujours au deuxième rang, mais à l'extrême gauche Marcel Chiapporé, puis Paul Boyer. Au dernier rang, de droite à gauche Maurice Perrin, puis Albert Camus sans calot.
Il fréquentait Camus à l’époque où il dirigeait le théâtre de l’Équipe et il le rencontrait souvent dans la Maison Fichu dite Maison devant le monde et dans l’atelier de Bénisti. En 1956, il devait participer aux côtés de Miquel, Simounet, Roblés, Maisonseul et Poncet, à l’organisation du mouvement de la Trêve Civile, faisant suite à l’appel d’Albert Camus. Peu après l’attribution du prix Nobel à Camus, il rédigea un portrait de Camus qui aurait du être publié dans le premier numéro de la revue Rivages, qui aurait dû reparaître. Le projet de reparution fut abandonné à la suite du plasticage de la librairie d’Edmond Charlot. Il disait dans cet article, publié seulement en 2016 : « A travers toute son œuvre court une vibration secrète qui lui donne son timbre unique: l'ardente volonté de prendre pleinement possession de sa condition d'homme, non pas dans la solitude, mais fraternellement avec tous ceux qui l'assument souvent dans l'obscurité, le désarroi ou le désespoir, ne le rend pas sourd au mystérieux appel d'une voix qui a nom Beauté, Innocence, Pureté... »
Jean-Pierre Bénisti
(1) Voir
Album Camus : iconographie choisie et commentée par Roger Grenier. Gallimard,, Bibliothèque de la pléiade, 1982.
Paul Mathieu : Petite histoire de la Khâgne africaine (Avant-propos de Guy Basset) in Présence d’Albert Camus. Revue publiée par la Sociétés des études Camusiennes, n°1, 2010
Jean-Pierre Bénisti : Camus au lycée d’Alger Blog : https://www.aurelia-myrtho.com/article-camus-au-lycee-d-alger-124987527.html
Maurice Perrin : Camus, élève de Khâgne à Alger in Louis Bénisti : On choisit pas sa mère. Souvenirs sur Albert Camus. L'Harmattan. Paris 2016 p.161-170
Jeanne Delais : l’Ami de chaque matin. Vie et luttes de Claude Terrien. Grasset, Paris, 1969 p. 114-115