Les journaux d’Alger nous ont fait part de la visite de Madame Brigitte Ayrault à Tipaza en compagnie de Catherine Camus. Les journaux nous ont aussi dit que la presse n’était pas invitée à couvrir l’événement : il n’y eut point de reportage télévisé, pas même une photo. Aux dernières nouvelles, Catherine Camus n’était pas présente, ce qui laisserait supposer que l’entretien du Premier ministre Jean-Marc Ayrault avec le Président Bouteflika n’aurait pas eu lieu (heureusement qu’il y a eu une photo dans la presse algérienne qui apparemment ne semblait pas du même type que les photos des manuels d’histoire de la Russie stalinienne.
Je discutais la semaine passée avec un ami qui s’était rendu à Tipaza récemment. Il m’a dit que cette stèle avec la phrase de Camus gravée par mon père, Louis Bénisti, était un monument très important mais qu’il était agacé par ceux qui réduisaient l’œuvre de Bénisti à cette stèle. Je suis en accord avec ce que dit cet ami, tout en lui faisant remarquer que si dans l’œuvre de Bénisti, la stèle risquait de jouer le rôle de l’arbre qui cache la forêt, elle incitait les lecteurs de Camus à s’intéresser à l’œuvre de Bénisti et aux œuvres de ses amis peintres ou architectes.
Au cours d’un récent séjour à Alger, je me suis rendu à Tipaza et j’ai remarqué que la stèle était surveillée par les gardiens et que le scellement avait été renforcé par un liseré de plâtre.
Le parc des ruines de Tipasa est devenu le lieu de rendez-vous des jeunes amoureux qui circulent au milieu des sarcophages. Il y a même des sarcophages doubles destinés aux Abélard et Héloïse ou aux Tristan et Yseult de l’époque romaine.
S ‘il y a une rue Mozart à Salzbourg, et je crois même une avenue Kafka à Prague, il n’y a pas de rue Albert Camus à Tipaza, pas plus que de d’avenue Sigmund Freud à Vienne. Un restaurateur a réparé l’oubli des autorités administratives de Tipaza en ouvrant sur le port un restaurant Albert Camus. Ce restaurant se trouve en face de l’emplacement du restaurant Varin, où Camus avait l’habitude d’aller et qui n’existe plus.
Au MAMA (1) (Musée d’art Moderne d’Alger), j’ai vu une exposition du peintre Djamal Tatah un peintre franco-algérien qui expose actuellement chez Maeght à Saint-Paul de Vence, un lieu qui expose très rarement les artistes vivants. Ce peintre fait beaucoup de très grands portraits en pied avec des fonds monochromes. Cet artiste a fait un triptyque composé de trois panneaux : deux panneaux avec un autoportrait du peintre de chaque côté d’un panneau représentant la stèle de Tipasa. Voilà maintenant que la stèle a rejoint les divinités adorées par les anciens.
La stèle est toujours à l’honneur dans les livres et Dominique Fernandez vient de faire avec le photographe Ferrante Ferranti un livre d’images, pour les parents et les enfants sages, intitulé Voyage en Algérie antique. Le livre (2) commence par une image de la stèle avant celles de monuments plus anciens.
Jean-Pierre Bénisti
- http://mama-dz.com/media/files/publication/djamel-tatah.pdf
- Dominique FERNANDEZ , Michel CHRISTOL, Sabah FERDI, Ferrante FERRANTI, Voyage en Algérie Antique. Actes-Sud, Arles, 2013
Voir :
Jean-Claude IZZO : Méditerranée des bonheurs possibles, in Le Point 15.08..1998
http://www.lepoint.fr/actualites-voyages/2007-01-23/mediterranee-des-bonheurs-possibles/1088/0/76997
Maïssa BEY Vous cherchez Camus ? Il est là-bas. Le Monde 04.05.06
http://www.limag.refer.org/Documents/LM20064maiCamusBey.pdf