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20 avril 2020 1 20 /04 /avril /2020 11:28

 

 

Peupliers et trembles
Peupliers et trembles

Jean-Paul de Dadelsen: Jonas. Gallimard. 1962

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19 avril 2020 7 19 /04 /avril /2020 11:44

Si je m'endormais au cœur du Rien dans des confins rongés d'eaux grises

Si je naissais dans des berceaux taillés dans le cœur des géants

Si j'avais le soleil pour dais, la nuit pour traîne et si le cœur

Du Monde résonnait avec les oiseaux sauvages dans mon cœur

 

Alors peut-être au centre de tout naîtrait une rose

Non plus un cri, mais une fleur vive dans un jardin

Et toutes les rumeurs, le bruit du ressac, le train des houles

Se tairaient pour une seule rose et son parfum.

 

Les arbres morts reverdiraient pour remonter dans leur voyage

Pour annoncer que sur les plages les hauts nuages et les vents

Ne croient plus aux Dieux morts, que tout revit dans la durée

D'une fleur d'un seul jour, que le temps partage le temps,

 

Et que tout continue et que tout recommence

Que l'intérieur regarde et parle et refleurit

Dans le silence revenu où l'on entend battre une rose.

 

 

 

 

Pierre Seghers

Racines in Disque Poésie de demain : Laurent Terzieff dit les poèmes de Pierre Seghers.

 

 

Olivier (Lourmarin 1961) © Jean-Pierre Bénisti

Olivier (Lourmarin 1961) © Jean-Pierre Bénisti

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19 avril 2020 7 19 /04 /avril /2020 11:18

ARBRE

 

Je suis un arbre voyageur

mes racines sont des amarres

Si le monde est mon océan 

en ma terre je fais relâche

Ma tête épanouit ses branches

à mes pieds poussent des ancres

Loin je suis près des origines

quand je pars je ne laisse rien 

que je ne retrouve au retour.

 

 

Frédéric Jacques Temple : La chasse infinie. Poésie. Gallimard. 2020

L'arbre ressuscité. Photo Henri Chouvet. 1978

L'arbre ressuscité. Photo Henri Chouvet. 1978

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18 avril 2020 6 18 /04 /avril /2020 15:01

 

 

 

    - Ne vois-tu pas que chaque plante est œuvre, et ne sais-tu pas qu’il n’y a point d’œuvre sans idée ?

  • Mais je ne vois d’auteur…
  • L’auteur n’est qu’un détail à peu près inutie.

 

Paul Valéry : Dialogue de l’arbre. in Eupalinos.  Gallimard 

 

Lourmarin  Août 1961 © Jean-Pierre Bénisti

Lourmarin Août 1961 © Jean-Pierre Bénisti

 

 

Mais toi, quand s’apaise le vent, et que la majesté du soleil calme, illumine tout ce qui est dans l’étendue, toi, tu portes sur tes membres divergents, sur tes feuilles innombrables, le poids ardent di mystère de midi ; et le temps tout dormant en toi ne dure que par l’irritante rumeur du peuple des insectes…Alors, tu me parais une sorte de temple, et ne m’est de peine ni de joie que je ne dédie à ta sublime simplicité.

 

 Paul Valéry : Dialogue de l’arbre. in Eupalinos.  Gallimard 

Lourmarin  Août 1961 © Jean-Pierre Bénisti

Lourmarin Août 1961 © Jean-Pierre Bénisti

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17 avril 2020 5 17 /04 /avril /2020 08:35

Chanson

 

Mon cheval arrêté sous l’arbre plein de tourterelles, je siffle un sifflement si pur qu’il n’est promesses à leurs rives que tiennent tous ces fleuves.

                                                                                     *

Feuilles vivantes au matin sont à l’image de la gloire et ce n’est point qu’un homme ne soit triste. Mais se levant avant le jour et se tenant avec prudence dans le commerce d’un vieil arbre, appuyé du menton à la dernière étoile. Il voit au fond du ciel à jeun de grandes choses pures qui tournent au plaisir.

                                                                                 *

Mon cheval arrêté sous l’arbre qui roucoule. Je siffle un sifflement plus pur et paix, à ceux, s’ils vont mourir, qui n’est point vu ce jour. Mais de mon frère le poète, on a eu des nouvelles. Il a écrit encore une chose très douce et quelques uns en eurent connaissance.

 

  Saint-John-Perse : Anabase. Gallimard. 

 

Lourmarin 1995 © Jean-Pierre Bénisti

Lourmarin 1995 © Jean-Pierre Bénisti

Cependant la sagesse du jour prend la forme d’un bel arbre et l’arbre balancé

qui perd une pincée d’oiseaux

aux bagnes du ciel écaille un vert si beau qu’il n’y a plus vert que le paraisse d’eau.

« Ne tirez pas si loin sur mes cheveux. »

 

 

 

 

  Saint-John-Perse : Éloges. Gallimard.

Lourmarin juillet 1971 © Jean-Pierre Bénisti

Lourmarin juillet 1971 © Jean-Pierre Bénisti

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16 avril 2020 4 16 /04 /avril /2020 08:13

Arbres du jour et de la nuit

 

Candélabres de la noirceur,
Hauts-commissaires des ténèbres,
Malgré votre grandeur funèbre
Arbres, mes frères et mes sœurs,
Nous sommes de même famille,
L’étrangeté se pousse en nous
Jusqu’aux veinules, aux ramilles,
Et nous comble de bout en bout.

À vous la sève, à moi le sang,
À vous la force, à moi l’accent
Mais nuit et jour nous ressemblant,
Régis par le suc du mystère,
Offerts à la mort, au tonnerre,
Vivant grand et petitement,
L’infini qui nous désaltère
Nous fait un même firmament.

Nos racines sont souterraines,
Notre front dans le ciel se perd
Mais, tronc de bois ou cœur de chair,
Nous n’avançons que dans nous-mêmes.
L’angoisse nourrit notre histoire
Et c’est un même bûcheron
Qui, nous couchant de notre long,
Viendra nous couper la mémoire.

 

Enfants de la chance et du vent,

Vous n'avez de père ni mère,

Vous êtes fils d'une grand-mère

La Terre, son vieil ornement,

Vous qui devenez innombrables

Dans vos branches comme à vos pieds

Et pouvez attraper du ciel

Aussi bien que fixer les sables.

 

Princes de l'immobilité,

Les oiseaux vous font confiance,

Vous savez garder le secret

D'un nid jusqu'à la délivrance.

À l'abri de vos cœurs touffus,

Vous façonnez toujours des ailes,

Et les projetez jusqu'aux nues

De votre arc secret mais fidèle.

 

Vous n'aurez pas connu l'amour,

Ô grandioses solitaires,

Toujours prisonniers de la Terre,

Ô Narcisses ligneux et sourds,

Ne regrettez pas l'aventure,

Heureux ceux que fixe le sort,

Ils en attendent mieux la mort,

Un voyageur vous en assure. 

 

Jules Supervielle

 

 

 

Cagnes (Les Collettes) 1963 ©  Jean-Pierre Bénisti

Cagnes (Les Collettes) 1963 © Jean-Pierre Bénisti

Feuille à feuille.

 

 

                               I

 

Puisque le sombre humus cache
Tant de vert par-devers soi
Et dans sa lourdeur compacte
Les futurs oiseaux des bois,
Arbres, vous sortez de terre,
Feuille à feuille, avec des chants
Qui sont les frais ornements
D'une commune misère.
Que vous soyez pins ou hêtres,
Chênes ou bien peupliers,
Une même façon d'être
Par le bas des prisonniers.
Et vous reprenez la place
Que le vent vous fit céder
Ne connaissant de l'espace
Que ce léger va-et-vient.
La hauteur cachée en terre,
Et se dressant peu à peu
Vous caresse et vous libère
Vers le ciel un petit peu.
Venus de la terre dense,
Humides de cent désirs,
Vous n'êtes plus qu'une essence
Et lui livrez vos soupirs.

 

                   II

Vous qui ne demandez rien,
Vous qui êtes toujours là,
Sans yeux, comme en ont les chiens,
Pour rappeler qu'ils sont là,
Arbres de mon grand jardin,
Dans un mouvement serein
Ouvrant nuit et jour les bras,
Vous nous faites oublier
Que vous ne les fermez pas,
Arbres graves, sans défauts,
Moitié tronc, moitié feuillage,
Et jamais trop peu ni trop
Ayant toujours ce qu'il faut
Pour votre immense veuvage,
Vous qui vivez parmi nous
Solitude jusqu'au cou
Malgré le vent, les oiseaux,
Et les hommes inégaux
Qui vous coupent en morceaux.
Que serviraient les regards
Ou de froncer les sourcils
Et l'avance ou le retard
Et tous les humains soucis ?
En dépit de vos racines
Vos troncs ne sont pas d'ici
Mais bien d'un pays caché
Dont nul ne peut approcher.
Et vous laissez un sillage
Sans avoir jamais bougé,
Comme les paralysés
Qu'on voit rêver sur les plages,
Vous qui nous poussez à vivre
Nous, moins que vous attachés,
A la façon d'hommes libres
Courant après leurs pensées.

Jules Supervielle

Lourmarin 1971  ©  Jean-Pierre Bénisti

Lourmarin 1971 © Jean-Pierre Bénisti

 

Pins

 

 

Ô pins devant la mer, 

Pourquoi donc insister 

Par votre fixité 

À demander réponse ? 

J'ignore les questions 

De votre haut mutisme. 

L'homme n'entend que lui, 

Il en meurt comme vous. 

Et nous n'eûmes jamais 

Quelque tendre silence 

Pour mélanger nos sables, 

Vos branches et mes songes. 

Mais je me laisse aller 

À vous parler en vers, 

Je suis plus fou que vous, 

Ô camarades sourds, 

Ô pins devant la mer, 

Ô poseurs de questions 

Confuses et touffues, 

Je me mêle à votre ombre, 

Humble zone d'entente, 

Où se joignent nos âmes 

Où je vais m'enfonçant, 

Comme l'onde dans l'onde.

 

 

Jules Supervielle

  

Hvar  Croatie 1986  © Jean-Pierre Bénisti

Hvar Croatie 1986 © Jean-Pierre Bénisti

S'il n'était pas d'arbres à ma fenêtre 

Pour venir voir jusqu'au profond de moi, 

Depuis longtemps il aurait cessé d'être 

Ce cœur offert à ses brûlantes lois. 

  

Dans ce long saule ou ce cyprès profond     

Qui me connaît et me plaint d'être au monde, 

Mon moi posthume est là qui me regarde 

Comprenant mal pourquoi je tarde et tarde...

 

Jules Supervielle

 

 

Hvar (Croatie) 1986 © Jean-Pierre Bénisti

Hvar (Croatie) 1986 © Jean-Pierre Bénisti

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15 avril 2020 3 15 /04 /avril /2020 07:25

L'oiseau et l'arbre sont conjoints en nous.  L'un va et vient, l'autre maugrée et pousse.

Paris 1996  © Jean-Pierre Bénisti

Paris 1996 © Jean-Pierre Bénisti

Effacement du peuplier

 

 

L'ouragan dégarnit les bois.

J'endors, moi, la foudre aux yeux tendres.

Laissez le grand vent où je tremble

S'unir à la terre où je crois.

 

Son souffle affile ma vigie,

Qu'il est trouble le creux du leurre

De la source aux couches salies

 

Une clé sera ma demeure

Feinte d'un feu que le cœur certifie;

Et l'air qui la tint dans ses serres.

 

(Retour Amont)

 

 

Sobres amandiers, oliviers batailleurs et rêveurs sur l'éventail du crépuscule, postez notre étrange santé.

 

René Char

Lourmarin 1981© Jean-Pierre Bénisti

Lourmarin 1981© Jean-Pierre Bénisti

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14 avril 2020 2 14 /04 /avril /2020 16:43

Le tronc d'arbre

 

Le tronc d'arbre (Poème de Francis Ponge)
Le tronc d'arbre (Poème de Francis Ponge)
Kabylie  avril 1968 Photo JPB

Kabylie avril 1968 Photo JPB

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14 avril 2020 2 14 /04 /avril /2020 16:08

Le jeune arbre

 

Ta rose distraite et trahie

Par un entourage d’insectes

Montre depuis sa robe ouverte

Un cœur par trop empiété

 

Pour cette pomme l’on te rente

Et que t’importe quelqu’enfant

Fais de toi-même agitateur

Déchoir le fruit comme la fleur

 

Quoiqu’encore malentendu

Et peut-être un peu bref contre eux

Parle ! Dressé face à tes pères

 

Poète vêtu comme un arbre

Parle, parle contre le vent

Auteur d’un fort raisonnement.

 

               (Hiver 1925-1926)

 

Francis Ponge : Proèmes. Gallimard. 1948

 

 

Algérie 1966  © Jean-Pierre Bénisti

Algérie 1966 © Jean-Pierre Bénisti

Le jeune arbre (Poème de Francis Ponge)

Francis Ponge : Proèmes

Le jeune arbre (Poème de Francis Ponge)
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13 avril 2020 1 13 /04 /avril /2020 16:05

Je plante en ta faveur cet arbre de Cybèle,
Ce pin, où tes honneurs se liront tous les jours :
J'ai gravé sur le tronc nos noms et nos amours,
Qui croîtront à l'envi de l'écorce nouvelle.

Faunes qui habitez ma terre paternelle,
Qui menez sur le Loir vos danses et vos tours,
Favorisez la plante et lui donnez secours,
Que l'Été ne la brûle, et l'Hiver ne la gèle.

Pasteur, qui conduiras en ce lieu ton troupeau,
Flageolant une Eglogue en ton tuyau d'aveine,
Attache tous les ans à cet arbre un tableau,

Qui témoigne aux passants mes amours et ma peine ;
Puis l'arrosant de lait et du sang d'un agneau,
Dis : " Ce pin est sacré, c'est la plante d'Hélène. "

 

 

Pierre de Ronsard : Sonnets pour Hélène

 

 

 

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