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10 avril 2021 6 10 /04 /avril /2021 07:18

Le débarquement allié en Afrique du Nord le 8 novembre 1942 (opération Torch), qui réussit grâce à la neutralisation des forces de Vichy par l’action de la Résistance française en Afrique du Nord, représente un tournant majeur de la Seconde Guerre mondiale, avec la bataille de ­Guadalcanal dans le Pacifique et celle de Stalingrad. Près de quatre-vingts ans après, il paraît important de revenir sur cet événement qui reste peu étudié en France. Comme la France métropolitaine, l’Afrique du Nord est prise en tenaille entre collaboration et vichysme d’un côté, et Résistance de l’autre. Le contexte est essentiel pour les orientations que prendra plus tard le mouvement national algérien.

Le but de cet ouvrage est d’éclairer le déroulement du 8 novembre 1942, afin de mieux en comprendre les développements historiques et politiques ainsi que les représentations socio-culturelles et artistiques du moment.

Sous la direction de Nicole Cohen-Addad, Aïssa Kadri et Tramor Quemeneur

 

 

 

 

Table des matières

Remerciements 

Présentation du colloque et de ses actes, Tramor Quemeneur

Avant-propos, Nicole Cohen-Addad

Introduction. Du débarquement aux prodromes de la décolonisation, Tramor Quemeneur

PREMIÈRE PARTIE. Le contexte maghrébin dans la Seconde Guerre mondiale

L’ Afrique du Nord dans la guerre 1939-1945, Christine Levisse-Touzé

Le décret Crémieux et son abrogation : Implications pour les participants au 8 Novembre 1942, Ethan Katz

Les chemins variés de la Résistance vers le 8 Novembre 1942 : Juifs et Musulmans, Ethan Katz

DEUXIÈME PARTIE. L’organisation de la Résistance

Analyse sociohistorique des acteurs du 8 novembre 1942, Nicole Cohen-Addad et Tramor Quemeneur

La police à Alger, 8 novembre 1942 : Les oubliés de la « victoire oubliée », Luc Rudolph

Les services polonais de renseignements en Afrique du Nord, Jean Medrala

Les acteurs du débarquement de 1942 en Afrique du Nord dans les archives orales du Service historique de la Défense, Romain Choron

TROISIÈME PARTIE. Les camps d’internement et de travaux forcés

Les camps d’internement en Afrique du Nord et au Sahara (1941-1944), Jacob Oliel

Panorama de l’internement des communistes en Afrique du Nord pendant la Seconde Guerre mondiale, Tramor Quemeneur

L’internement en Algérie (1939-1943) : témoignages de républicains espagnols, Bernard Sicot

Les « Pionniers Israélites », tout un programme,  Nicole Cohen-Addad

QUATRIÈME PARTIE. Le débarquement et ses répercussions

« Le plus dangereux des intangibles » : Le point de vue américain sur l’ Afrique du Nord française novembre 1942, Douglas Porch

Les Britanniques entre Washington, Vichy et de Gaulle, Robert Gildea

Le débarquement allié en Algérie Perspectives algériennes, les années 1940, Aïssa Kadri

La France combattante au cœur du maelström, Guillaume Piketty

Le débarquement allié du 8 novembre 1942 dans la presse clandestine de la Résistance française en métropole, Guy Krivopissko

CINQUIÈME PARTIE. La vie intellectuelle et le 8 Novembre 1942

La vie culturelle en Algérie dans les années 1940, Yahia Belaskri

La guerre, moment fort des éditions Charlot, Guy Basset

Albert Camus et ses camarades militants du PCA : d’un Front-populisme de combat au pacifisme et à la Résistance, Christian Phéline 241

Fontaine en 1942, François Vignale

Les artistes à Alger durant la Seconde Guerre mondiale, Jean-Pierre Bénisti

L’École d’ Alger, Françoise Assus Juttner

Marguerite Caminat en son temps ou la « découverte » de Baya, Anissa Bouayed, 

Conclusions

Écrivains et artistes dans la vie culturelle en Algérie autour de la Seconde Guerre mondiale, Anissa Bouayed

Lectures d’hier, chantiers de demain, Robert Gildea

Postface, Aïssa Kadri

Cahier-couleurs

Liste des contributeurs

Le débarquement allié en Afrique du Nord le 8 novembre 1942 (­opération Torch), qui réussit grâce à la neutralisation des forces de Vichy par l’action de la Résistance française en Afrique du Nord, représente un tournant majeur de la Seconde Guerre mondiale, avec la bataille de ­Guadalcanal dans le Pacifique et celle de Stalingrad. Près de quatre-vingts ans après, il paraît important de revenir sur cet événement qui reste peu étudié en France. Le débarquement se déroule sur un territoire qui est alors français : l’Algérie est constituée de départements, le Maroc et la Tunisie sont des protectorats. Comme la France métropolitaine, l’Afrique du Nord est prise en tenaille entre collaboration et vichysme d’un côté, et Résistance de l’autre. Des singularités marquent les modes et les formes de résistance en Afrique du Nord, entre autres la diversité politique des acteurs du débarquement du 8 novembre 1942. Si la Résistance et la collaboration ont leurs formes propres sous les colonies, les mémoires sont aussi différentes. Le contexte est essentiel pour les orientations que prendra plus tard le mouvement national algérien.

Le but de ces contributions est d’éclairer le déroulement des événe- ments autour du débarquement allié du 8 novembre 1942, afin de mieux en comprendre les développements historiques et politiques ainsi que les représentations socio-culturelles et artistiques du moment.

C’est ainsi que des chercheurs français, anglais, américains et algériens se sont retrouvés aux Invalides à Paris autour de cet événement majeur de la Seconde Guerre mondiale.

Sous la direction de :

Nicole Cohen-Addad : réalisatrice d’archives orales, présidente de l’association Les Compagnons du 8 Novembre 1942 - Actes de Résistance - Mémoire et Recherche

Aïssa Kadri : professeur émérite des universités à l’université Paris 8, associé au CNAM - Centre National des Arts et Métiers

Tramor Quemeneur : docteur en histoire. Enseignant à l’université Paris 8 et à CY Cergy Paris Université, membre du Musée national de l’histoire de l’immigration.

 

 

https://editions-croquant.org/hors-collection/724-8-novembre-1942-resistance-et-debarquement-allie-en-afrique-du-nord.html?fbclid=IwAR275FHPvmqBi33imN5pKBbEqEsVGuzvc5q6_rkpyW6ZXvP8AVsaMylC_eU

 

8 novembre 1942. Résistance et débarquement allié en Afrique du Nord
Port d'Alger !Rampe Tafourah) 1940-50

Port d'Alger !Rampe Tafourah) 1940-50

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3 avril 2021 6 03 /04 /avril /2021 15:18

Il y a soixante ans, le 4 avril 1961, était inauguré à Orléansville (aujourd’hui Chlef), le Centre Culturel Albert Camus. Ce centre avait été conçu dans le cadre du plan de reconstruction d’Orléansville après le séisme de 1954. Camus qui s’était rendu à Orléansville avait fait part à Miquel et Simounet de ses observations sur un projet de théâtre au sein de ce centre1...À l’occasion de l’ouverture de ce centre, il y, eut quelques manifestations artistiques. Mon père, le peintre Louis Bénisti, qui avait travaillé avec Miquel et Emery au théâtre de l’Equipe d’Albert Camus dans les années 30, avait de nouveau aider Miquel en organisant une exposition de peintres amis de Camus. Parmi les artistes qui exposaient, il y avait Galliero, De Maisonseul, Assus, Caillet, Clot, Degueurce, Suzanne Delbays, Thomas-Rouault, Marie Viton, Étienne Chevallier, Maurice Girard, Nicole Algan, Bénisti….

Le centre n’était pas un théâtre traditionnel, mais un lieu de théâtre, ressemblant aux Maisons de la Culture, que Malraux devait promouvoir dans les années 60 à Chalons sur Saône, Bourges, Thonon, ou Grenoble. Louis Bénisti nous dit dans un entretien de 1990 :: « il est à noter que Miquel et Simounet se sont  mis d’accord pour mettre sur pied toutes les initiatives théâtrales que Camus, Miquel et Simounet, Émery avaient réunis en étudiant non seulement le théâtre à l’Italienne, le cirque romain, le théâtre japonais, le théâtre oriental et ils avaient essayé de réunir tous ces éléments pour faire ce qu’on pourrait appeler un lieu culturel et c’était véritablement un lieu culturel dans lequel il y avait différentes possibilités de manifestations théâtrales. Il est à noter toutefois que je ne sais pour quelles raisons, à cause peut-être du caractère de Simounet et de Miquel et d’Émery aussi, qui certainement avait participé à la réflexion de ce théâtre, ce théâtre  a été bâti avec un certain rigorisme, un certain puritanisme, on pourrait dire que par exemple il y avait une scène qui se déployait devant un amphithéâtre un peu à la romaine, mais un amphithéâtre de béton avec une circulation, mais point de velours et point de fauteuils et point de coussins, chacun  devant apporter les commodités de son siège. »  Il y avait aussi un théâtre de plein air devant la piscine « sur un théâtre extérieur qui était organisé toujours avec des gradins surplombant un théâtre aquatique constituant une piscine d’un très beau dessin et sur laquelle on pouvait organiser des représentations nautiques. Et ça c’était très beau. »2 La cérémonie d’inauguration commençait à onze heures par un discours de Poncet prononcé dans le théâtre de plein air devant la piscine. Poncet retraça le passé algérien d’Albert Camus et insista sur son intérêt pour la reconstruction d’Orléansville et que « depuis le 4 janvier 1960, son souvenir nous accompagne chaque jour », il cita Morvan Lebesque qui considérait Camus comme « le dernier des Justes. ». L’après-midi nous avions assisté à une série de spectacles de théâtre des pièces qui venaient d’être mis en scène avec des jeunes stagiaires du Centre. Il y avait d’abord Meurtre dans la Cathédrale de TS Eliot, mis en scène par Jean Rodien dans le théâtre couvert, puis un spectacle en langue arabe de Ould Abderramane Kaki, avec beaucoup d’intermèdes musicaux et chorégraphiques, puis nous sommes sortis du théâtre couvert pour assister à la représentation de la Mégère apprivoisée de Shakespeare en langue arabe, mise en scène par Kamel Babadoun, dans le théâtre de plein air devant la piscine. Le spectacle  se terminera par une plongée des acteurs dans la piscine... Nous sommes de nouveau retournés dans le théâtre couvert où la troupe des Capucines présentait un spectacle pantomime : un conte bulgare, un ballet sur une musique de Duke Ellington. Cette troupe des Capucines était dirigée par Françoise Becht, qui devait devenir la première femme de Simounet. Il y avait dans cette troupe Boudjemaa Bouhada, qui, peu après, devait rejoindre la troupe parisienne de Jean-Marie Serreau et jouer dans les pièces de Kateb Yacine. Il t mourut prématurément en juin 1990. Après un entracte pour nous permettre de nous restaurer, nous devions voir le soir une représentation de Prométhée enchaîné, dans une mise en scène d’Henri Cordreaux.

Au cours de cette journée nous avons beaucoup échangé. Nous avons vu notamment les Perrin, qui avait été le condisciple de Camus et Fréminville dans la classe d’hypokhâgne du Lycée d’Alger3.). Nous ne nous doutions pas que trois mois plus tard Maurice Perrin devait être assassiné par un commando de l’OAS. 

Peu de temps, après l’inauguration du ce centre culturel, sera inauguré à Tipasa, le 29 avril, la stèle à la mémoire de Camus gravé par Louis Bénisti. Sur cette pierre romaine était gravée une phrase de Camus : Je comprends ici ce qu’on appelle gloire, le droit d’aimer sans mesure.4 »

Je suis retourné en 1965 à Orléansville devenue El Asnam après l’Indépendance. Le centre était ouvert et il semblait avoir quelques modestes activités. J’en informais Miquel au cours d’un passage à Paris qui semblait rassuré de l’utilisation de son théâtre. 

Monsieur Maurice Besset, spécialiste de l’architecture moderne et ancien conservateur du musée de Grenoble fit une visite en Algérie indépendante uniquement pour voir les œuvres de Miquel et de Simounet 5

En 1980 un nouveau séisme atteignit la plaine du Chélif et devait atteindre Orléansville devenue depuis l'Indépendance, El Asnam. Et comme pour essayer d’oublier cette catastrophe El Asnam devint alors Chlef. Beaucoup de bâtiments furent détruits, le Centre résista. Louis Miquel aurait voulu revoir l’état de son œuvre, mais il ne put réaliser ce voyage. 

J’ai appris que le Centre Camus était devenu le Centre Larbi Tebessi, du nom du fondateur avec le Cheikh Ben Badis, de la société des Oulémas. Je voudrais signaler à ces honorables fonctionnaires qui ont pris la responsabilité de débaptiser le bâtiment, que Albert Camus fut un jour le défenseur d’un ouléma le Cheikh El Okbi, lorsqu’il avait été incarcéré par l’administration coloniale. Ce changement de nom est un acte tout à fait imbécile et inamical, car Camus avait contribué à la conception de ce centre et les architectes Miquel et Simounet ont été des amis de Camus. Et pourquoi mettre en conflit posthume Camus avec Larbi Tebessi ?

            Nous avions perçu au cours de cette réunion d’inauguration à Orléansville qu’une Algérie ouverte et fraternelle était encore possible. Les jours suivants cette journée devaient être de plus en plus noirs.  

  

Jean-Pierre Bénisti

  

NOTES : 

  

  1. Voir Roland SIMOUNET : Traces écrites. Pézénas, éditions Domens, 1996 
  2. Voir Entretien de Louis Bénisti avec Jean-Pierre Bénisti (inédit) 
  3. Voir ; JPB La Khâgne du lycée d’Alger (article du mars 2011 sur ce Blog) et in Louis Bénisti : On choisit pas sa mère p.169-170. L'Harmattan. Paris 2016
  4. Voir Jean-Pierre Bénisti :  Bénisti, Camus et Tipasa : Actes du colloque de Tipasa, d’Avril 2006  organisé sous la direction d’Afifa Bererhi; Albert Camus et les lettres algériennes, l’espace de l’interdiscours  p. 493-503. Blida, éditions du Tell, 2007
  5. Maurice Besset (1921-2008) historien d’art proche de Le Corbusier auteur de Nouvelles architectures françaises, Ed ; Niggle et Teufeu, Suisse1968. Voir André Fermigier : Les bâtisseurs clandestins Le Nouvel Observateur, 17 avril 1968. « Les réalisations les plus brillantes de l’architecture française contemporaine  se situent peut-être hors de France, en Afrique du Nord, par exemple (…) où Jean Bossu, Louis Miquel et Roland Simounet, l’Atelier d’Urbanisme et d’architecture, ont construit des édifices sociaux ou culturels tout à fait remarquables. »

VOIR AUSSI :  

1.Çeux qui dérangent leurs contemporains ; L'Architecte Louis MIquel. Revue CRÉÉ : n°25 juin-juillet 1975.p.37-45

2. Louis Miquel : Centre Albert Camus. El Asnam. Revue Tecniques et Architectures. Février -Mars 1980.p.62-63

3. Roland Simounet . Monographie d'architecture . La Moniteur 1985. Réédition 1997.

4. Jean-Pierre Bénisti :  Camus et les architectes d'Alger. Présence d'Albert Camus. n°6 2014 p;82-92

5. Jean-Pierre Bénisti :; Souvenirs sur Louis Miquel  in Maîtres carrés. Catalogue de l'exposition Miquel -Marmotte du Musée de Besançon en novembre 2018. p.150-163

5. Albert Camus : Correspondance avec ses amis Bénisti. Bleu Autour; Saint Pourçain 2019

6. Soraya Bertaud de Chazeaud : Aujourd’hui à Chlef le centre Larbi Tebessi, hier à Orléansville le centre Albert-Camus (1955-1961), Livraisons d’histoire et d’architecture.39,2015   https://doi.org/10.4000/lha.560

7.Louis Miquel  Cité de l’architecture Notice Biographique https://archiwebture.citedelarchitecture.fr/pdf/asso/FRAPN02_MIQLO_BIO.pdf

Le Centre Culturel Albert-Camus d'Orléansville (aujourd'hui Chlef) ( 60 ans déjà)  Nouvelle édition.
Le Centre Culturel Albert-Camus d'Orléansville (aujourd'hui Chlef) ( 60 ans déjà)  Nouvelle édition.
La piscine du Centre Camus . On reconnaît le metteur en scène Henri Cordreaux. Photo JPB

La piscine du Centre Camus . On reconnaît le metteur en scène Henri Cordreaux. Photo JPB

Le jour de l'inauguration : Louis Bénisti avec Louis et Jeanne Miquel. Photo Jean Degueurce.

Le jour de l'inauguration : Louis Bénisti avec Louis et Jeanne Miquel. Photo Jean Degueurce.

Photo Jpb

Photo Jpb

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6 mars 2021 6 06 /03 /mars /2021 17:43

 

Beaucoup de parisiens et de visiteurs ignorent la statue phallique qui se trouve sur le Pont de la Tournelle et qui représente Sainte Geneviève. Cette statue est l'oeuvre de Paul Landowski, le sculpteur du Monument aux morts d'Alger et du Christ de Rio. 

L'efficacité de ce monument, qui était censé protéger Paris de futures invasions, comme la Sainte avait protégé la capitale lors de l'invasion des Huns, est très discuttable. 

Louis Bénisti, qui a peint beaucoup les ponts de Paris au cours de ses séjours à Paris, jugeait ce monument tout à fait  incongru. Il ne l'a pas représenté dans son tableau.  

  

Jean-Pierre Bénisti

Pont de la Tournelle
Pont de la Tournelle
Le Pont de la Tournelle par Louis Bénisti (1953)

Le Pont de la Tournelle par Louis Bénisti (1953)

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23 février 2021 2 23 /02 /février /2021 10:45

Toutes les grandes figures de la poésie et de la chanson qui ont bercés notre enfance fichent le camp.

Après Anne Sylvestre, c’est Hélène Martin qui s’en va.

Mes relations avec cette chanteuse remontent à très loin.

J’avais acquis vers 1960, alors que j’étais encore au lycée, un petit disque où sur une face Hélène chantait des poèmes d’Éluard qu’elle avait mis en musique, et sur l’autre face Serge Reggiani disait de façon magistrale et sans musique les poèmes du même poète.

 

 

Au théâtre d’Alger, en 1964, peu de temps après l’Indépendance, le cabaret de la Contrescarpe présentait un spectacle de chansons avec des chanteurs peu connus comme Paul Villaz qui chantait des chansons loufoques très amusantes.   Mais moi, le nénuphar de tout ça, je m’en fous, je suis un végétal, ça ne me fait rien du tout. Il y avait aussi Hélène Martin, qui avait chanté dans cette soirée un poème d’Aragon extrait des Poètes : Ainsi Prague. Peu après une inconnue, Francesca Solleville, nous séduisit avec Comme à Ostende de Ferré et Caussimon et Nuit et Brouillardde Ferrat

 

Durant l’été 67, lorsque j’étais au Festival d’Avignon, un des spectacles donnés l’après-midi au célèbre Verger d’Urbain V, était conçu par Hélène Martin. Il s’agissait d’un montage poétique de textes de René Char, pour protester contre l’implantation de missiles à tête nucléaire sur le plateau d’Albion. Outre le texte de René Char sur le sujet, les comédiens lurent des textes des Feuillets d’Hypnos et de chansons d’Aragon ou d’Éluard chantées par Hélène Martin et Francesca Solleville. Il est permis de s’étonner que René Char, très sévère sur Aragon, ait accepté que des chansons d’Aragon soient chantées à côté de ses poèmes. Cela reste une énigme. Hélène Martin avait réussi à concilier ces deux grands poètes fort différents.

Plus tard, j’ai suivi l’itinéraire de cette chanteuse et j’ai écouté ces disques avec les mises en musique de poètes aussi divers que Supervielle, Genet, Seghers ou Queneau.

 

En décembre 1985, alors que je me rendais à la Maison Jean Vilar à Avignon au vernissage de l’exposition des décors d’André Acquart, un grand ami de ma famille, j’ai rencontré Hélène Martin, qui préparait un spectacle à partir du Condamné à mort de Jean Genet dans des décors de Acquart.

 

Depuis, je ne l’ai plus entendu souvent.

Saluons cette grande dame de la poésie et de la chanson.

 

 

Jean-Pierre Bénisti

 

Le condamné à mort  Jean Genet

https://youtu.be/1CumaK6iQng

 

Hommage à la vie Jules Supervielle

https://youtu.be/4_GUqZgoIbk

 

Anthologie René-Guy Cadou

https://youtu.be/k2DgQxIEU4w

 

Tsiganes Pierre Seghers

https://youtu.be/4kY232vt9OU

 

Ainsi Prague Aragon

https://youtu.be/IK2Gl181ya4

https://youtu.be/udZpDogXqh4

 

Jean Giono

https://youtu.be/iyu6L7Szo8c?list=OLAK5uy_kGIuOJGEYsjmoUCbp7brqg52q_cRomyyA

 

Hommage à la vie Jules Supervielle

https://youtu.be/4_GUqZgoIbk

 

René Char

https://youtu.be/IdryPdxb60k

https://youtu.be/GL5ex7VwiPw

 

Paul Éluard

https://youtu.be/y7w-uqG79x8

https://youtu.be/uBDhj5yQaKc

 

Rue du château Luc Bérimont

https://youtu.be/c9sdVPpzV10

 

Tant de sueur humaine Raymond Queneau

https://music.youtube.com/watch?v=09vOhut2cPA&list=RDAMVM09vOhut2cPA

 

 

Salut à Hélène Martin
Salut à Hélène Martin
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30 janvier 2021 6 30 /01 /janvier /2021 07:43

Le rapport sur la Guerre d’Algérie remis par Benjamin Stora au Président Macron suscite un grand nombre de réactions. Paradoxalement le texte semble à la fois critiqué aussi bien par des algériens enfants de militant du FLN, que par des pieds-noirs ou par des enfants de harkis.

     Le fait que les critiques viennent de personnes d’horizons différents, nous incite à réfléchir et considérer que ce texte peut servir à accomplir un travail mémoriel de part et d’autre de la Méditerranée, en constatant que les mémoires sont forcément différentes selon les individus. De plus, nous savons tous que nos souvenirs sont reconstruits.

 

       Le Président de la République, qui est né longtemps après la fin de la guerre d’Algérie, essaie de faire un acte de réconciliation entre français et algériens ou plutôt une réconciliation des français et des algériens avec leur histoire.

 

       Il me semble que les préoccupations actuelles des français et des algériens ne permettent pas d’envisager un travail de mémoire de façon sereine. Nous sommes tous préoccupés par la crise du Corona virus. De plus le Président Tebboune est malade et sa légitimité est contestée par le Hirak. Le Président Macron est en fin de mandat. Il semble prématuré d’envisager tout acte solennel en ces temps troublés.

 

          Benjamin Stora n’a pas assez insisté sur les liens constitutifs liant la France et l‘Algérie.

1° L’Algérie a ses frontières héritées de la période coloniale. Si les frontières algéro-marocaines et algéro-tunisiennes ont été tracées à partir du terrain par des administrateurs français, les frontières du sud subsahariennes ont été tracées loin du terrain et ont été tracées à partir des cartes, sans tenir compte de la géographie. Ces frontières ne sont pas remises en cause  par les autorités algériennes et ont été validées au premier sommet de l’OUA à Addis-Abeba en 1963.

2° La France a actuellement une constitution élaborée par le Général de Gaulle et Michel Debré, élaborée après une crise franco-algérienne et faite pour permettre la stabilité gouvernementale, nécessaire pour résoudre le problème algérien.


        Il est vain de faire l’inventaire de toutes les exactions commises au cours de la colonisation ou au cours de la guerre d’Algérie. Ces derniers sont couverts par l’amnistie des accords d’Évian, dont il importe de saluer les négociateurs, français et algériens. Ils sont arrivés à un compromis très difficile. L’amnistie n’est pas l’amnésie. L’histoire demeure et il est important que les historiens travaillent, loin des polémiques stériles.

 

        Il ne faut pas oublier que la guerre d’Algérie n’est pas une guerre franco-algérienne mais la résultante de deux conflits : conflit franco-français entre les partisans de l’Algérie française et ceux qui étaient favorables à l’Indépendance, conflit algéro-algérien entre les algériens soutenant le FLN (majoritaire) et toutes les autres forces politiques : MNA, partisan du maintien de l’Algérie au sein de la France, comme les harkis ou autres.

 

          Nous assistons actuellement à divers psychodrames : les Algériens, sont amers, car, ils n’apprécient pas le régime autoritaire institué depuis l’Indépendance et rendent l’ancienne puissance coloniale responsable de leurs malheurs. Les pieds noirs ont un profond ressentiment, car ils se trouvent comme beaucoup de populations du XXème siècle (Arméniens, Juifs d’Europe Centrale, Palestiniens ou Kurdes …) réduits au rang des personnes déplacées qui non seulement sont exilées mais ne peuvent même en cas de retour retrouver leurs pays, à la différence de travailleurs africains exilés ou de réfugiés politiques russes ou espagnols.

 

Le grand problème de la mésentente entre algériens et français vient du fait qu’ils n’ont pas souvent couché ensemble et de ce fait les communautés vivaient séparés et se méprisaient. Des colonisations ont naguère réussi lorsque les envahisseurs et les envahis faisaient des enfants ensemble. C’est ce qui s’est passé dans l’Empire romain ou dans des pays comme le Brésil.  

 

 

            Jean-Pierre Bénisti

Tipasa Mai 2013 Photo JPB

Tipasa Mai 2013 Photo JPB

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10 décembre 2020 4 10 /12 /décembre /2020 19:49

 Souvenirs du 11 Décembre 1960   

 

    

                 La visite du Général en Algérie était annoncée pour le 9 décembre 1960. Les mouvements favorables au maintien de l’Algérie au sein de la République Française appelaient les Français d’Algérie à se mettre en grève et à manifester leurs hostilités à la politique de De Gaulle. Nous nous sommes réunis le 8 décembre au CEALD1  (Comité Étudiant d’Action Laïque et Démocratique), dont j’étais adhérant, pour définir notre position par rapport à cette grève. Devant le risque d’affrontements, il a été décidé de ne pas faire grève mais d’éviter tout affrontement avec les grévistes. Je me suis donc rendu au lycée le matin du vendredi 9 décembre. Il y avait peu de non-grévistes. Nous avions appris que des manifestations hostiles à la politique de De Gaulle avaient lieu et prenaient la forme d’une insurrection. Les forces de l’ordre encerclaient les bâtiments officiels. On craignait que l’armée, qui obéissait pour le moment au pouvoir légal, ne bascule du côté des insurgés. Il y eut quelques échauffourées et le Centre Culturel Américain a été mis à sac et transformé en « Centre Cul », le « turel Américain » étant ôté par les manifestants. J’ai appris que quelques jeunes dont H, un camarade de classe, qui avaient jeté des pavés dans la devanture du Centre culturel, avaient été arrêtés et incarcérés.  Dans la cour du lycée, j’ai rencontré Blanca2 et je lui ai fait allusion à la position du CEALD. Il me répondit de façon évasive et le lendemain je l’ai revu et il m’a dit : « Mais tu te rends compte, tu me parles librement devant tous mes collègues fascistes ! ». Inconsciemment, j’étais téméraire : l’être pour soi, c’est possible, mais il faut bien se garder de compromettre ses amis et son entourage et cela je ne l’ai compris que plus tard.

Cette insurrection des Français a tourné court, car de façon inattendue les Algériens se levèrent en masse et manifestèrent leur solidarité avec les combattants pour l’indépendance. Les manifestants ne pouvaient atteindre le centre-ville, car les forces de l’ordre en empêchaient l’accès. Les grandes manifestations se sont déroulées sur les hauteurs d’Alger, au Climat de France, près de la cité bâtie par Pouillon avec sa magnifique cour, (cité des colonnes), qui semblait avoir été conçue pour recevoir les manifestants - un autre forum, si l’on veut- à Dar el Maçoul, Birmandreis, le Ravin de la Femme sauvage, le Clos Salambier. Nous n’avions pas de télévision et nous nous sommes contentés d’entendre les reportages à la radio avec les commentaires d’un jeune reporter dénommé Jean-Pierre Elkabach. Nous entendions les slogans qui étaient scandés accompagnés par les youyous des femmes. Il y en avait d’acceptables : Algérie Indépendante ou Algérie Algérienne. D’autres étaient tout à fait inconvenants tel que : Algérie musulmane ou encore les pieds-noirs au crématoire. Et nous nous interrogions sur le désir réel de la population musulmane. Si les manifestants criaient Algérie musulmane, cela voulait dire que tous les chrétiens, les juifs, les athées et même les Algériens de parents musulmans mais ne voulant pas faire référence à leur religion d’origine, n’avaient pas de place dans ce pays et qu’il ne restait plus pour les non musulmans que de préparer les valises. Je minimisais ces inquiétudes en pensant que ces slogans étaient criés sans réflexion par une foule en colère. Tout cela nous interrogeait sur l’avenir du pays. De mon balcon, je vis passer des camions de parachutistes exhibant les drapeaux vert et blanc qu’ils avaient saisis chez les manifestants. Ces drapeaux avaient été confectionnés très vite et n’étaient pas frappés du croissant et de l’étoile rouge. Ils ressemblaient aux drapeaux vaudois des helvètes, mais ceux-ci n’étaient pas frappés de la devise : Liberté et Patrie. La tenue de ces manifestations nous interrogeait, il ne semble pas qu’il y eut beaucoup de Français d’Algérie égarés au milieu des manifestations pris à partie, blessés voire tués, il n’empêche que ceux qui ont traversé des cortèges, ont passé un fort mauvais quart d’heure. Un ami me racontait récemment qu’il s’était trouvé en voiture avec son père bloqué par les manifestants du côté du Ravin de la Femme sauvage et qu’ils n’étaient pas très rassurés. Il y eut aussi le saccage de la grande synagogue de la rue Randon : est-ce une opération voulue par le FLN, pour inciter les juifs à quitter le pays ou est-ce bien l’œuvre de jeunes voyous incontrôlés ? Mon père me disait qu’il ne fallait pas exagérer l’importance de cet acte, car une destruction de biens, furent-ils des édifices religieux, ne pèse pas lourd face aux destructions de vie.  Il y a des choses qui se sont déroulées au cours de ces journées dont on a peu parlé : les forces de l’ordre ont fait usage de leurs armes pour disperser les manifestants algériens, Ils ne l’ont pas fait vis-à-vis des manifestations Algérie Française et cela a été souligné par Jean-François Revel dans France Observateur, qui parlait de deux poids, deux mesures. On a vu avec émotion dans les journaux suivant ces manifestations, des photographies de manifestante brandissant le drapeau de l’indépendance à la manière de cette Liberté guidant les peuples de Delacroix. Mais cette jeune manifestante ne laissait pas son corsage tomber laissant apparaître un sein nu comme dans le tableau du Louvre.

Quelques jours après les manifestations, ma mère, qui était médecin, s’était rendue en visite auprès d’une jeune accouchée au Climat de France. La voiture qui la transportait en compagnie du mari de la cliente, a été agressée par des jeunes qui brandissaient des bâtons et des barres de fer. L’accompagnateur, qui était algérien, s’adressa en arabe aux jeunes et leur dit : « Visite Toubiba » Les jeunes se dispersèrent. Ma mère, qui avait un tempérament particulièrement anxieux, a été très affectée par la frayeur qu’elle a ressentie à la vue des manifestants.

Le conflit algérien venait de franchir un point de non-retour. Les Algériens avaient montré qu’ils étaient majoritairement pour leur souveraineté. Quelques jours après ces folles journées, nous avons été à la Galerie Comte-Tinchant où exposaient trois peintres qui travaillaient dans une démarche commune : JAR Durand, Jean de Maisonseul et René Sintès. Ce fut probablement la dernière expo que je vis dans cette galerie. Durand, qui ne dissimulait pas sa tristesse et nous dit : « C’est désespérant ! On ne sait plus où l’on va ! Je serais tenté de mettre la clé sous la porte et de foutre le camp. »

Notre tante Suzanne, sentant que l’Algérie allait devenir indépendante voulut se débarrasser des petits biens qu’elle possédait dans ce pays. Malgré les conseils de la famille lui demandant de reporter son voyage, elle vint à Alger pendant cette période troublée. Elle fut étonnée de voir les vitrines achalandées de produits de luxe pour Noël. Cela est normal, la vie continue. Les fêtes de Noël étaient particulièrement tristes cette année, d’autant plus que le couvre-feu n’avait pas été levé les soirs de réveillons.

À l’occasion du nouvel an, Sauveur, un ami de la famille, nous rendit la visite traditionnelle de bonne année qu’il avait l’habitude de rendre chaque année avec sa femme. On entendait les joueurs de boule qui jouaient dans le boulodrome situé sous notre fenêtre. Ils terminaient leur partie de pétanque en chantant sur un air connu (un ami vient de ma dire qu’il s’agit de sur les grands flots bleus :

Ah ! le bateau !

Le bateau, le bateau, le bateau !

Ah ! Qu’il était beau !

Le bateau, le bateau, le bateau !

Ce chant annonçait un prochain départ. Le bateau viendra un jour prochain, les prendre pour les emmener vers une autre rive, laissant à jamais leur terre natale.

Sauveur nous dit à propos de ces joueurs de boule : « Regarde-moi ces mecs  qui jouent à la pétanque ! Nous avons tendance à les considérer comme des abrutis. Mais c’est eux qui ont compris la vie, ils ont compris que la vie est un jeu de cons, alors ils essaient d’oublier cette évidence en tapant la boule. »

 

                                               Jean-Pierre Bénisti

 

  1. CEALD voir Jean SPRECHER : À contre-courant. Étudiants libéraux et progressistes à Alger 1954-1962 Bouchène. Paris, 2000
  2. Antoine BLANCA (1936-2016) étudiant en espagnol était en 1960 surveillant au lycée. II devint ambassadeur à Buenos Aires en 1984.
La Liberté guidant les peuples (Nouvelle édition)
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2 décembre 2020 3 02 /12 /décembre /2020 15:39

 

Il y a quarante ans le 2 décembre 1980, Romain Gary mettait fin à ses jours. Je republie à cet occasion ce qu'il avait écrit dans la Promesse de l'aube à propos de Camus. 

 

Dans la  Promesse de l'aube,  Romain Gary cite Camus :   

 Mon père avait quitté ma mère peu après ma naissance.

Parmi les lettres qui m'étaient parvenues à cette époque, il y en avait une qui me donnait les détails sur la mort de celui que j'avais si peu connu.

Dans sa lettre, sans doute pour me faire plaisir, il m'écrivait que mon père n'était pas arrivé jusqu'à la chambre à gaz qu'il était tombé raide mort de peur, avant d'entrer.

je suis resté longuement la lettre à la main; je suis ensuite sorti dans l'escalier de la N.R.F., je me suis appuyé à la rampe et je suis resté là, je ne sais combien de temps, avec mes vêtements coupés à Londres, mon titre de Chargé d'Affaires de France, ma croix de la Libération, ma rosette de la Légion d'honneur, et mon prix Goncourt.

j'ai eu de la chance : Albert Camus est passé a ce moment-là et, voyant bien que j'étais indisposé, il m'a emmené dans son bureau.

L' homme qui est mort ainsi était pour moi un étranger, mais ce jour-là, il devint mon père, à tout jamais."

 

Romain Gary : La promesse de l'aube, Chapitre XIV Gallimard 1960. Éditions Folio page 120

 

 

Le site Albert Camus de Facebook a publié aujourd'hui  un extrait d'une préface de ';édition américaine de la Peste par Romain Gary 

 

"Il est très difficile, curieusement, de se rappeler les paroles d’amis disparus ; c’est qu’on ne fait pas trop attention quand ils sont présents. Je me souviens du sourire de Camus et de la gravité de son visage – les deux expressions se succédaient parfois en quelques secondes – bien mieux que de sa conversation. Je n’ai jamais fait grand cas des paroles, de toute façon. Mais maintenant que sa voix s’est tue, les mots ne me font que mieux sentir à quel point elle me manque. Il me semble toutefois me rappeler qu’il disait… non en fait, rien de bien important. Juste qu’il est des vérités qui valent qu’on meure pour elles, mais aucune qui vaille qu’on tue en leur nom. C’est alors qu’il écrivit La Peste". ----

Romain Gary

Romain Gary fait un clin d'oeil à Camus (nouvelle édition)
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24 novembre 2020 2 24 /11 /novembre /2020 18:47

La douceur de l'anisette

 

 

La douceur de l'anisette

de Rosa CORTéS

C’est au temps de la Toussaint rouge et bien après la défaite des Républicains espagnols que se situe l’intrigue de ce livre. L’héroïne, une adolescente qui a suivi ses parents dans leur exil vers l’Algérie, raconte les péripéties qui ont jalonné sa vie, et celle de sa famille, durant les années cinquante. Voguant entre exaltations de la jeunesse et découvertes multiples, elle nous entraîne dans un Alger illuminé de mille soleils qui, pourtant, n’éteignent pas l’écho des drames à venir.

Cette tranche de vie et d’Histoire, qui va de 1956 à 1962, mêlée aux évènements décisifs et sanglants qui secouent le pays, nous est relatée par l’adolescente dans un récit drôle et poignant à la fois, servi par une écriture passionnée qui éclaire aussi bien la chute et la désespérance d’un peuple que l’émergence et les espoirs impatients de l’autre.

L’après-midi, je me réfugiais sous la tonnelle sur une chaise en fer ouvragé posée devant une table ronde aux pieds en esses. Tout était peint en vert et s’harmonisait étrangement avec la pâleur violacée des grappes de glycine qui croulaient de tous côtés quand elles fleurissaient. Ma mère s’inquiétait des abeilles par l’odeur alléchées mais mon père la rassurait. Et moi je m’immergeais sous la fraîcheur capiteuse de cet abri qui me paraissait idéal pour la lecture et la méditation. Je devenais une sève palpitante dans les lourdes senteurs vespérales.

 

17€

 

 

 

 

 

 

La couverture du livre reproduit un tableau de Louis Bénisti : le petit jardin vu d'en-haut. Ce tableau avait retenu l'attention de Jean Sénac qui disait dans un article d'Oran Républicain en juillet 1947 : " Dans le petit jardin vu d'en haut (...), le peintre crée avec des moyens très simples, très plastiques et des éléments lyriques familiers une harmonie subtile et vibrante d'ingénuité."  Voir Jean Sénac : Visages d'Algérie. Documents réunis par Hamid Nacer-Khodja.Paris-Méditerranée éditeur, 2002;

La couverture du livre reproduit un tableau de Louis Bénisti : le petit jardin vu d'en-haut. Ce tableau avait retenu l'attention de Jean Sénac qui disait dans un article d'Oran Républicain en juillet 1947 : " Dans le petit jardin vu d'en haut (...), le peintre crée avec des moyens très simples, très plastiques et des éléments lyriques familiers une harmonie subtile et vibrante d'ingénuité." Voir Jean Sénac : Visages d'Algérie. Documents réunis par Hamid Nacer-Khodja.Paris-Méditerranée éditeur, 2002;

Parution de deux livres ayant des peintures de Bénisti comme couverture

 

Pour commander notre dernière publication, "La douceur de l'anisette" de Rosa Cortés, 3 solutions :

1- Chez votre libraire préféré s'il pratique le "Clique et collecte" ou "Click and collect "

2- directement sur notre site et il arrivera en 48H en métropole et en une semaine environ à l'étranger. https://www.editionsfemmeschevrefeuille.fr/.../la.../

L'Algérie à cœur 

Récits croisés

Éditions de Anamnèse. Lyon 2020

12€

Parution de deux livres ayant des peintures de Bénisti comme couverture

Pour commander l'ouvrage voir:

coupdesoleilra@gmail.com

 

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9 novembre 2020 1 09 /11 /novembre /2020 10:35

En octobre 70, je finissais des études de Médecine et la faculté de Grenoble, où j’étais inscrit m’avait envoyé à l’hôpital Camille Blanc d’Évian pour y effectuer un stage.

Cette saison, beaucoup de personnalités disparurent : Nasser, Mauriac. De Gaulle avait dit à la mort de Mauriac : « Son souffle s’est arrêté. C’est un grand froid qui nous saisit. » Agacé par l’insistance des informations télévisées sur les conséquences de la mort de Nasser, des personnes avaient des réactions méprisantes sur la façon dont les musulmans faisaient le deuil de leur leader, d’autre comme le Docteur L nous dit : « J’appréhende le jour où De Gaulle va partir. Pendant trois mois, la télévision ne va parler que de ça. »  Et le 10 novembre, alors que nous étions en  visite avec le Docteur C, une malade qui semblait préoccupée nous dit : « Je viens d’écouter la radio, le Général De Gaulle vient de s’éteindre à l’âge de quatre-vingts ans. Il aurait eu une rupture d’anévrysme alors qu’il était en train de faire une réussite, auprès de sa femme ! Pauvre Tante Yvonne ! ». Le docteur  C interrompit un instant sa visite et nous dit : « Ce fut un grand personnage. Une page de notre histoire se tourne. » Le lendemain, c’était le 11 novembre, Un des amis, Bernard , est venu me voir et m’a fait faire une promenade à Montreux. Nous avons remarqué au passage de la frontière franco-suisse que le drapeau français était en berne, alors que deux mètres plus loin, le drapeau helvète ne l’était pas. Les Suisses, il est vrai, n’étaient pas en deuil. Il eut été cependant normal qu’aux postes frontières, les drapeaux soient en berne des deux côtés, par solidarité entre voisins et oui, il ne faut surtout pas prendre l’Helvétie pour des lanternes !

Le lendemain 12 novembre, c’était le jour des obsèques et j’ai assisté en compagnie des malades, à la retransmission télévisée de la messe à Notre-Dame. Je n’ai pu assister à la retransmission des obsèques à Collombey, car j’étais de service. Un étrange silence régnait sur Évian, où les rares magasins ouverts en automne avaient baissé leurs rideaux. On entendait seulement le croassement des corbeaux qui volaient autour du lac. Un médecin de l’hôpital nous dit : « Celui-là , même sa mort, il ne pas raté. Dans les jours qui suivaient, j’étais étonné de voir les réactions de certaines personnes admiratrices du Général qui allaient jusqu’à l’idolâtrer. Il y eut un car qui partit d’Évian pour Collombey et quelques employés de l’hôpital Camille Blanc firent le voyage.

Quand je vis mes parents à Alger, au mois de décembre, ils me racontèrent comment la mort de De Gaulle avait été ressentie à Alger. La communauté française avait été vexée car, le drapeau, en berne en raison du deuil consécutif à la mort de Nasser cessait de l’être le jour même de l’annonce de la disparition du Général. Quelle ingratitude envers l’homme qui avait permis à l’Algérie de devenir indépendante. Mes parents se rendirent à la cathédrale où Monseigneur Duval avait célébré une messe. L’Ambassadeur de France, Monsieur Jean Basdevant y assistait et reçut les condoléances de l’assistance.

Charles S, un cousin médecin qui était installé à Nice et gaulliste de la première heure nous fit part de son écœurement en voyant des pieds-noirs se réjouissant de la mort de De Gaulle en ouvrant une bouteille de Champagne. J’ai toujours pensé que quelle que soit l’aversion que l’on peut avoir envers une personne, il est inconvenant  de se réjouir de sa mort et j’ai eu de vives discussions avec des collègues, pourtant médecins, qui se sont réjouis en novembre 1975 de la mort de Franco. Je détestais ce personnage, mais je n’avais aucune raison de me réjouir de sa disparition physique.

Pour ma part, j’avoue n’avoir pas été toujours en accord avec la politique du Général.

Vis à vis de ce grand homme, j’ai eu une position ambivalente. J’étais gaulliste lorsque je me trouvais hors de France et je ne l’étais plus lorsque j’étais à l’intérieur de l’hexagone. Je n’ai pas apprécié la façon dont il est revenu au pouvoir en 1958 et sur la Constitution de la V ème République. J’admire surtout l’homme du 18 juin et celui qui a permis à la France d’avoir sauvegardé son indépendance par rapport aux Etats-Unis.

Il a aussi le mérite d’avoir résolu le problème algérien. Je sais que beaucoup de gens lui reprochent d’avoir  traité l’affaire d’une manière trop chirurgicale en négligeant  les pieds-noirs et  les harkis. Cela est vrai. Mais, la France était au bord de la guerre civile. Le problème était extrêmement complexe, et il l’a résolu.

 

                                               Jean-Pierre Bénisti.

 

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De Gaulle par Picasso

De Gaulle par Picasso

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22 octobre 2020 4 22 /10 /octobre /2020 09:11

Réponse de Monsieur Germain à Albert Camus le 30 Avril 1959 :

 

Mon cher petit,

(...) Je ne sais t'exprimer la joie que tu m'as faite par ton geste gracieux ni la manière de te remercier. Si c'était possible, je serrerais bien fort le grand garçon que tu es devenu et qui restera toujours pour moi « mon petit Camus».

(...) Qui est Camus ? J'ai l'impression que ceux qui essayent de percer ta personnalité n'y arrivent pas tout à fait. Tu as toujours montré une pudeur instinctive à déceler ta nature, tes sentiments. Tu y arrives d'autant mieux que tu es simple, direct. Et bon par-dessus le marché ! Ces impressions, tu me les a données en classe. Le pédagogue qui veut faire consciencieusement son métier ne néglige aucune occasion de connaître ses élèves, ses enfants, et il s'en présente sans cesse. Une réponse, un geste, une attitude sont amplement révélateurs. Je crois donc bien connaître le gentil petit bonhomme que tu étais, et l'enfant, bien souvent, contient en germe l'homme qu'il deviendra. Ton plaisir d'être en classe éclatait de toutes parts. Ton visage manifestait l'optimisme. Et à t'étudier, je n'ai jamais soupçonné la vraie situation de ta famille, je n'en ai eu qu'un aperçu au moment où ta maman est venue me voir au sujet de ton inscription sur la liste des candidats aux Bourses. D'ailleurs, cela se passait au moment où tu allais me quitter. Mais jusque-là tu me paraissais dans la même situation que tes camarades. Tu avais toujours ce qu'il te fallait. Comme ton frère, tu étais gentiment habillé. Je crois que je ne puis faire un plus bel éloge de ta maman.

J'ai vu la liste sans cesse grandissante des ouvrages qui te sont consacrés ou qui parlent de toi. Et c'est une satisfaction très grande pour moi de constater que ta célébrité (c'est l'exacte vérité) ne t'avait pas tourné la tête. Tu es resté Camus: bravo. J'ai suivi avec intérêt les péripéties multiples de la pièce que tu as adaptée et aussi montée: Les Possédés. Je t'aime trop pour ne pas te souhaiter la plus grande réussite: celle que tu mérites.

Malraux veut, aussi, te donner un théâtre. Je sais que c'est une passion chez toi. Mais.., vas-tu arriver à mener à bien et de front toutes ces activités ? Je crains pour toi que tu n'abuses de tes forces. Et, permets à ton vieil ami de le remarquer, tu as une gentille épouse et deux enfants qui ont besoin de leur mari et papa. A ce sujet, je vais te raconter ce que nous disait parfois notre directeur d'Ecole normale. Il était très, très dur pour nous, ce qui nous empêchait de voir, de sentir, qu'il nous aimait réellement. « La nature tient un grand livre où elle inscrit minutieusement tous les excès que vous commettez.» J'avoue que ce sage avis m'a souventes [sic] fois retenu au moment où j'allais l'oublier. Alors dis, essaye de garder blanche la page qui t'est réservée sur le Grand Livre de la nature.

Andrée me rappelle que nous t'avons vu et entendu à une émission littéraire de la télévision, émission concernant Les Possédés. C'était émouvant de te voir répondre aux questions posées. Et, malgré moi, je faisais la malicieuse remarque que tu ne te doutais pas que, finalement, je te verrai et t'entendrai. Cela a compensé un peu ton absence d'Alger. Nous ne t'avons pas vu depuis pas mal de temps...

Avant de terminer, je veux te dire le mal que j'éprouve en tant qu'instituteur laïc, devant les projets menaçants ourdis contre notre école. Je crois, durant toute ma carrière, avoir respecté ce qu'il y a de plus sacré dans l'enfant: le droit de chercher sa vérité. Je vous ai tous aimés et crois avoir fait tout mon possible pour ne pas manifester mes idées et peser ainsi sur votre jeune intelligence. Lorsqu'il était question de Dieu (c'est dans le programme), je disais que certains y croyaient, d'autres non. Et que dans la plénitude de ses droits, chacun faisait ce qu'il voulait. De même, pour le chapitre des religions, je me bornais à indiquer celles qui existaient, auxquelles appartenaient ceux à qui cela plaisait. Pour être vrai, j'ajoutais qu'il y avait des personnes ne pratiquant aucune religion. Je sais bien que cela ne plaît pas à ceux qui voudraient faire des instituteurs des commis voyageurs en religion et, pour être plus précis, en religion catholique. A l'École normale d'Alger (installée alors au parc de Galland), mon père, comme ses camarades, était obligé d'aller à la messe et de communier chaque dimanche. Un jour, excédé par cette contrainte, il a mis l'hostie « consacrée» dans un livre de messe qu'il a fermé ! Le directeur de l'École a été informé de ce fait et n'a pas hésité à exclure mon père de l'école. Voilà ce que veulent les partisans de « l'École libre » (libre.., de penser comme eux). Avec la composition de la Chambre des députés actuelle, je crains que le mauvais coup n'aboutisse. Le Canard Enchaîné a signalé que, dans un département, une centaine de classes de l'École laïque fonctionnent sous le crucifix accroché au mur. Je vois là un abominable attentat contre la conscience des enfants. Que sera-ce, peut-être, dans quelque temps? Ces pensées m'attristent profondément.

Sache que, même lorsque je n'écris pas, je pense souvent à vous tous.

Madame Germain et moi vous embrassons tous quatre bien fort. Affectueusement à vous.

Monsieur Germain

 

 

 

 

Hommage à Samuel Paty
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