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13 septembre 2022 2 13 /09 /septembre /2022 13:59

Alain Tanner, William Klein, Jean-Luc Godard, bien que ces grans artistes aient atteint la nonantaine, en deux jours cela fait un peu trop !

J'ai toujours eu beaucoup d'admiration pour le cinéaste Godard, mais je trouve le personnage antipathique. Un cinéaste est avant tout un regardeur, mais est-ce utile de dissimuler son regard par d'énormes lunettes noires. Est-il utile de comparer les camps du Club Méditerranée avec les camps de concentration ?

Je n'ai pu voir À bout de souffle à sa sortie car il était interdit au moins de 18 ans. Les censeurs devaient être atteints de myopie intellectuelle.

Le premier film de JLG que j'ai vu a été Alphaville dont j'avais surtout apprécié les citations de Capitale de la Douleur d'Éluard. Puis il  y eut Pierrot le fou l'un des plus grands films du XX ème siècle. En lisant Elie Faure , Belmondo pointe une pub de la gaine scandale et dit : "Il y a eu la civilisation égyptienne, il a eu la Renaissance et maintenant, nous entrons dans la civilisation du cul." Je me souviens d'Anna Karina chantant des chansons de Rezvani : la ligne de chance.

J'ai beaucoup aimé une Femme mariée et Vivre sa vie avec le fameux dialogue avec Brice Parrain. 

Je me souviens de la première de La Chinoise dans la Cour d'honneur d'Avignon.

J'ai moins aimé les films post-soixante huit-art. Toutefois Passion est un très beau film.

Pour moi, Godard est avant tiout un cinéaste qui sait voir et il a considérablement marqué le cinéma du XX ème siècle. Il y a un cinéma avant Godard et un cinéma d'après.

 

                                        Jean-Pierre Bénisti

Voir : 

 

Une femme est une femme

https://youtu.be/hPEr5KY_jGQ

Vivre sa vie

https://youtu.be/F7emMyNMRNk

https://youtu.be/gwWD6Y-J2Yk

Femme mariée

https://www.arte.tv/fr/videos/107365-000-A/une-femme-mariee/?fbclid=IwAR2JkFapg9lhff9x7iB17FXPmX7wj8Hrg0gym0B4YH9WG2k2xXM4criAgaw

Pierrot le fou

https://youtu.be/2Gn9m7Ht7Ns

https://youtu.be/ul5beWXDa7c?t=10

Anna Karina

https://www.aurelia-myrtho.com/2019/12/adieu-anna-karina.html?fbclid=IwAR168Swa1Je1GNIvy-4lTVfk9831KtJx-m2whff0SnEml9w2_hI-vcoasCw

Anne Wiazemski

https://www.aurelia-myrtho.com/2017/10/je-me-souviens-d-anne-wiazemski.la-premiere-de-la-chinoise-a-avignon-en-1967.html

 

 

 

 

 

 

 

Je me souviens de Jean-Luc Godard
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9 septembre 2022 5 09 /09 /septembre /2022 10:06

 

 

Extraits de Souvenir d’enfance

 

 

 

Au cours de l’été 1953, Lucien et Mireille, mon oncle et ma tante, nous ont emmenés à Chantilly, ce château où je comptais voir les manuscrits des Très riches heures du Duc de Berry, dont j’avais vu les enluminures qui ornaient les publicités médicales que recevait ma maman. Ces manuscrits n’étaient pas exposés, il n’y avait que les enluminures reproduites. Par contre, Mireille m’a montré les dessins coloriés de Clouet et les miniatures de Fouquet qui m’ont émerveillé. Mon père a fait part de ses critiques de ce musée : il renfermait des chefs-d’œuvre qui étaient très mal présentés : c’était un fatras. Dans le parc du château, des carpes apparaissaient dans la rivière qui alimentait la pièce d’eau entourant le château. C’était, paraît-il, des carpes baguées et certaines, dit-on auraient été placées sous François 1er.. Cette légende est peu vraisemblable. Les carpes vivent longtemps, mais sont au plus centenaires.

Carpes que vous vivez longtemps

Est-ce que la mort vous oublie

Poissons de la mélancolie !

Disait Apollinaire.

Ah ! ces carpes, comme on voudrait les farcir à la juive !

Au bar près du château, il n’y avait point de crème Chantilly.

Avec ma grand-mère, j’ai eu l’occasion de visiter le Panthéon, ce monument où reposent des hommes illustres comme Voltaire, Victor Hugo ou autres.

L’oncle Henri m’avait parlé du musée de l’Homme et manifestant le désir de visiter ce musée, Mireille me proposa une visite guidée avec Paul Monié, une personne connaissant bien l’Afrique. Paul m’avait été présenté comme étant un ami de Lucien et Mireille et bien plus tard, j’ai compris que Paul était l’amant de Mireille. Paul me fit une visite très instructive et me dit que ce musée était fait pour étudier comment vivent les hommes dans les différents continents. Il me dit que si on devait étudier notre peuple, il y aurait en vitrine une chaise comme nous en avons chez nous, les vêtements que nous pourrions portés et les ustensiles qui sont dans nos cuisines. Il me présenta les salles consacrées à l’Afrique. Nous sommes passées devant la statue d’une dame aux grosses fesses : c’était la Vénus Hottentote. Les théories anthropologiques tournant autour de cette dame callipyge ne semblaient pas intéresser notre guide qui s’évertua plutôt à me commenter les masques africains. J’ai été étonné d’apprendre que ces masques étaient utilisés pour des cérémonies qui n’étaient pas forcément des réjouissances et que certaines tribus dansent avec ces masques pour des mariages, mais aussi des obsèques. Je pensais que, né en Algérie, j’appartenais au continent africain, mais que ce monde des Africains des colonies nous paraissait lointain car le Sahara est bien plus difficile à traverser que la Méditerranée.

Après l’Afrique avec Paul, Mireille essaya de me mener en Asie en me faisant visiter le musée où elle travaillait le Musée Guimet. Elle me montra quelques sculptures khmères. Elle avait particulièrement étudié les sculptures qu’elle me montrait, pour sa thèse sur le Médaillon Lotiforme dans la sculpture indienne, qu ‘elle venait de soutenir.

Le mardi, jour de fermeture des musées, Mireille m’invita au cinéma pour voir « Une reine est couronnée » film documentaire sur le couronnement de la reine Élisabeth II.  Il était étrange de voir le couronnement d’une Reine qui se faisait en 1952 de la même façon qu’il se serait fait au Moyen-âge, seul le cinéma qui filmait l’événement était nouveau. Cet intérêt des Français pour la Reine d’Angleterre traduisait peut-être une certaine nostalgie de nos monarchies de jadis. Nous remarquions qu’en Angleterre une Reine n’est pas forcément l’épouse du Roi. L’épouse du Roi devrait être dans ce cas une Princesse Consort. Je pensais à la chanson d’enfants que nous chantions en Algérie :

C’est la Reine d’Angleterre

Terre terre

Qui s’est fichue par terre

Terre terre terre

Avec Abdel Kader

Der der der

Sur une toile d’emballage

 

 

                                                         Jean-Pierre Bénisti.

                                                      (écrit à Lyon en 2012)

 

 

La Reine à Tipaza en octobre 1980

La Reine à Tipaza en octobre 1980

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29 juin 2022 3 29 /06 /juin /2022 15:49

        En juin 1962, je me trouvais à Paris. J’avais dû quitter Alger en septembre 1961 et une tante m’avait hébergé. Le 25 juin, je devais passer  le bac au lycée Honoré de Balzac à Clichy. Je n’avais pas été satisfait de mon examen, mais après une telle impréparation, je ne pouvais qu’attendre un miracle. 

            À la fin de la semaine, alors que les habitants de l’Algérie s’apprêtaient à voter au referendum d’autodétermination, je reçus un appel d’un ami qui m’invitait à venir passer un week-end à Trouville, dans une maison appartenant à sa famille. J’ai été ravi de pouvoir me promener en Normandie. Cette région dont les maîtres d’école d’Algérie nous avaient vanter le charme en nous faisant apprendre par cœur  une chanson en l’honneur d’un pays qui ne nous avait pas donné le jour.  J’ai pu apprécier ces coins de Normandie que beaucoup de peintres avaient p représenté,notamment Boudin ou Marquet... Nous avons été à Honfleur et à Deauville. Je n’étais pas encore familiarisé au flux et au reflux, étant avant tout méditerranéens.

            Alors que la France organisait le rapatriement des pieds-noirs qui affluaient dans les ports et les aéroports, l’Algérie votait et déjà des dissensions apparaissaient au sein de la  direction du FLN.  Mohamed Khidder démissionnait du GPRA, puis  Ben Bella démissionnait à son tour. On apprenait qu’ils partaient à la frontière algéro-marocaine rejoindre l’armée algérienne des frontières dirigée par le Colonel  Boumediene., qui s’opposait à l’armée des maquis des différentes wilayas. Le  "bordel" commençait et cette situation chaotique était naturellement exploitée par les nostalgiques du temps de la colonisation. .

      Après ce séjour en Normandie, je rentrais à Paris et je trouvais des cousins qui revenaient d’Alger dans une immense tristesse apprenant que l’Algérie passait le cap de l’indépendance. Cette tristesse contrastait avec mon enthousiasme. Je venais de me procurer le numéro spécial de l’Espoir Algérie, journal des libéraux d’Algérie, qui reparut pour saluer l'Algérie indépendante et encourager les libéraux à  travailler dans la nouvelle Algérie. Ce numéro de l’Espoir devait être le dernier. Il y avait en première page une citation d’Emmanuel Robles :

-         Quelle peut bien être ta patrie ?

-         Là, où tu veux vivre sans subir l’humiliation.

 

Je passais au quartier latin et je rencontrais Pierre Salama, qui arrivait d’Alger et me dit qu’il voudrait  voir mes parents en compagnie de sa sœur Myriam et  son beau-frère : Maître Yves Dechézelles. Au bar le Soufflot, qui était paraît-il un café de gauche, je rencontrais l’acteur Boudjemaa Bouhada, qui me présenta son ami le peintre Denis Martinez. Ce dernier parcoura la revue Partisan, que je venais d’acheter chez Maspéro et apprécia un poème de Nordine Tidafi intitulé Paix. Il  y avait aussi dans cette revue  un poème trouvé chez un soldat de l’ALN tué au maquis. Je m’aperçus que j’avais déjà lu ce poème et qu’il était de Malek Haddad.

Et la colombe, la paix revenue dira :

Qu’on me fiche la paix,

Je redeviens oiseau

Je me suis précipité à la librairie la Joie de lire pour signaler l'erreur à Marie-Thérèse Maugis, l’épouse de Maspéro à l’époque qui me dit que l’erreur avait été signalée et qu’il était émouvant d’apprendre que des maquisards algériens aimaient la poésie.

 

         Le 5 juillet, Mouloud B., militant trotskyste et vraisemblablement membre de la fédération de France du FLN m’avait invité à venir fêter l’Indépendance  autour d’un couscous, il m’avait  donné rendez-vous au métro Bonne Nouvelle. J’hésitais à aller fêter cet événement,   vis-à-vis de ma famille qui si elle devait apprendre que je partage le couscous avec les indépendantistes,  en aurait été  blessée. Malgré tout, je décidais de me rendre  au lieu de rendez-vous, mais j’y arrivais trop tard et ne je ne pouvais rencontrer mes camarades. C’était sans doute un acte manqué. J’allais donc au quartier latin et je faisais le tour des restaurants algériens de la rue de la Huchette. Ils avaient tous pavoisé avec des drapeaux verts et blancs et l’on entendait des chants patriotiques algériens dont Min Djibellina, ce fameux chant qui commence par l’air de Sambre et Meuse. Un Algérien m’offrit le numéro spécial de l’Ouvrier algérien,   journal de l’UGTA, qui avait revêtu les couleurs du drapeau algérien. Je rentrais à midi au 64 où je retrouvais mes cousins, qui manifestaient leur tristesse. L’après-midi, je fis le tour des boulevards extérieurs et j’ai pu apprécier l’ambiance festive créée par les Algériens, boulevard de la Chapelle, Boulevard de la Villette, Belleville et Ménilmontant.

          Bien plus tard, Jean Pélégri me racontant cette fameuse journée du 5 juillet 1962 me dit  que ce jour-là, il était à la fois heureux de voir la fin de la guerre et les Algériens retrouvant leurs dignités, mais aussi triste de voir ses compatriotes français devant quitter l’Algérie ou y rester mais  dans un pays  devenu étranger. Il me dit avoir eu la visite de deux amis algériens : Mourad Bourboune  et Abdallah Benanteur qui lui dirent : « Jean, nous savons qu’aujourd’hui, c’est pour toi un jour difficile et nous ne voulions pas te laisser seul ce jour. »  Les trois amis firent un tour le soir sur les quais de Seine qui en ce temps du mois de juillet étaient très animés. Vers dix heure du soir, ils entendirent une voix crier : « Mourad ! Mourad ! » Mourad Bourboune se retourna et vit un de ses anciens camarades pied-noir qui venait de quitter l’Algérie. « Tu te souviens Mourad  du professeur de latin qui nous faisait apprendre des tirades de l’Enéïde ! » Et voilà que le jour de l’Indépendance de l’Algérie un Algérien et un Français se mettent à déclamer des vers de Virgile :

Arma virumque cano, trojae qui primus ab oris, italiam fato profugus Laviniaque venit..

Voir algériens et français se retrouver le jour de l’indépendance de l ‘Algérie sur les bords de la Seine pour réciter l’Enéide paraît surréaliste... Nous comprenons aisément  que le colonialisme n ‘a pas été entièrement négatif.

Le soir de ce 5 juillet, j’ai écouté les informations à la radio, pour savoir comment les manifestations s’étaient déroulées en Algérie. Les algérois ont manifesté leurs joies avec beaucoup de dignité. À Oran, par contre, il y eut des morts. On aurait tiré sur des manifestants,   et  des Européens furent massacrés. Ces troubles à Oran sont encore aujourd’hui  encore inexpliqués.

J’ai rejoint mes parents en Algérie, seulement en septembre 62 le jour où le peuple d’Alger manifestait aux cris de « Sebbaa snin Baraket ! » (Sept ans, c’est assez !).

 

                                                           Jean-Pierre Bénisti

Fontaine à Alger photo JPB 1962

Fontaine à Alger photo JPB 1962

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1 juin 2022 3 01 /06 /juin /2022 15:26

Louise Bosserdet, une figure du milieu intellectuel et artistique d’Alger, était dans les années 30 une militante communiste.

    Elle fit en 1935 un voyage en URSS et rapporta un reportage sur l’Ukraine pour le journal Alger-Étudiant1, n°20, 30 novembre 1935, journal qui publia les premiers articles d’Albert Camus, notamment sur les peintres.

  Son récit de voyage en URSS a été le premier livre publié par Edmond Charlot2 en 1937, sous le titre : Une Française en URSS.

   Devant les images d’enfer de l’Ukraine actuel, il est difficile de penser qu’il y eut dans ce pays des personnes qui croyaient encore au paradis.

  Par la suite Louise Bosserdet devint peintre et habita une villa mauresque située sur les hauteurs d’Alger, qui était voisine de la villa Marquet. Dans cette villa, se réunissaient souvent les peintres algérois comme Bernasconi, Tona, Bénisti, Galliero, Benaboura, Degueurce, Claro et bien d’autres…

 

             Jean-Pierre Bénisti

 

  1. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5711638s.r=20%20novembre%201935?rk=42918;4
  2. Voir Edmond Charlot, catalogue raisonné d’un éditeur méditerranéen. Par François Bogliolo, Jean-Charles Domens, Marie-Cécile Vène. Éditions  Domens, Pézénas, 2015

 

 

Un curieux reportage sur l’Ukraine écrit par une algéroise en 1935
Un curieux reportage sur l’Ukraine écrit par une algéroise en 1935
Un curieux reportage sur l’Ukraine écrit par une algéroise en 1935
Un curieux reportage sur l’Ukraine écrit par une algéroise en 1935
Une peinture de Louise Bosserdet (1958)

Une peinture de Louise Bosserdet (1958)

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26 mai 2022 4 26 /05 /mai /2022 11:56

Samedi 21 mai je terminais un séjour à Venise avec ma compagne et je m’apprêtais à prendre l’avion   pour Paris. Au moment de l’enregistrement, deux hôtesses de la compagnie Easy jet nous réclamèrent des passes sanitaires. Je leurs ai expliqué à ce moment que les passes  sanitaires n’étaient plus exigés en France depuis début avril et qu’il n’avait pas à exiger ce document. Si j’avais toujours mon passe sur mon téléphone, ma compagne ne l’avais plus et elle fut obligé d’aller faire un test nasal pour la modique somme de 35€  à l’autre bout de l’aéroport.

    Nous n’avons donc pu embarquer avec l’avion prévu et nous avons perdu les billets de retour qui n’étaient pas remboursables.

    Nous sommes retournés à notre hôtel, qui heureusement avaient encore une chambre disponible. Il a fallu que je réserve par Internet des billets d’avion pour le lendemain. J’ai réservé deus billets sur Air France, un peu plus chers que les billets perdus.

     Le lendemain les hôtesses d’Air France ne nous ont pas demandé des passes sanitaires et nous ont confirmé que ces documents n’étaient plus exigés.

    J’en ai donc déduit que les hôtesses de la compagnie Easy jet étaient employées pour emmerder les voyageurs et j’ai inscrit cette compagnie aérienne sur la liste des compagnies à ne pas recommander.

 

                              Jean-Pierre Bénisti

(Photo JPB)

(Photo JPB)

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13 avril 2022 3 13 /04 /avril /2022 08:34

Il y a vingt ans, le 22 avril 2002, nous avons vécu un cauchemar. Aujourd’hui nous risquons de vivre bien plus qu’un cauchemar.

 

La personne qui risque de devenir présidente de la république est dangereuse. Elle est certes différente de son père, avec lequel elle s’est fâchée, mais elle n’en a pas refusé l’héritage. Elle est plus présentable, car son discours n ’est pas antisémite et il est plus xénophobe que raciste. Son concurrent du premier tour, atteint d’une haine de soi pathologique, l’a déchargé de tous les délires pétainistes, racistes et antisémites, qu’affectionnait le père.

 

Son programme qui semble favorable à une défense du pouvoir d’achat ne tient pas la route et masque une idéologie réactionnaire, identitaire et anti-européenne.

 

De plus, elle ne pourra jamais avoir de majorité parlementaire et faute de cohabitation, naguère possible sous Mitterand et Chirac, elle ne pourra se faire. Elle sera donc obligée d’agir par coups d’état.

 

J’ai beaucoup d’amis, de gauche comme de droite qui critiquent le précédent quinquennat. D’autres le défendent. Toutes ses critiques sont forcément fondées, mais elles ne justifient pas que l’on s’abstienne, ou que l’on vote blanc.

 

Il est donc urgent de voter Macron. !

Voter Macron le 22 avril, ne signifie pas pour autant que l'on vote pour les législatives pour les candidats macronistes. Il est important que chacun vote selon ses convictions. Il serait dommage que les anciennes familles socialistes ou gaullistes disparaissent du paysage politique.

 

Jean-Pierre Bénisti

 

 

 

 

 

 

 

Photo JPB

Photo JPB

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7 avril 2022 4 07 /04 /avril /2022 15:54

Entretien avec Jean-Pierre Bénisti ( (13 janvier 1990)

Louis Bénisti :J’étais là et je regardais le ciel d’hiver. Il me vint à l’idée qu’ici à Paris, où j’allais mener une existence pour ainsi dire frileuse, j’avais quitté un atelier magnifique, j’avais quitté une situation et j’avais quitté une gentille maîtresse avec laquelle je m’entendais, j’avais quitté tout ça, pour une aventure qui aurait pu bien tourné si Paris et la France étaient restés dans un climat de paix, mais je veux dire aussi que quand j’ai pensé à cette petite maîtresse que j’avais laissée à Alger., j’ai eu tout de même un serrement de cœur parce que j’avais fait véritablement beaucoup de peine à une fille qui, sans doute venait me voir parce qu’elle avait pour moi ce qu’on peut appeler de l’amour. Voilà, j’étais complètement démuni et je ne savais comment j’allais pouvoir orienter mon existence parisienne. Au café de la Rotonde, je rencontrais des gens qui devinrent mes amis, mes amis peintres, sculpteurs que je commençais à fréquenter. Les noms de tous ces gens-là ont disparu de ma mémoire sauf l’un qui s’appelait Schroeter qui m’accueillit même chez lui et me donna le conseil d’aller voir mon député pour demander une subvention d’installation. Ça, c’était une idée épatante et alors sur les conseils de Schroeter, j’ai été voir mon député et j’ai obtenu une petite subvention en attendant qu’un inspecteur des beaux-arts viennent me voir pour regarder mes œuvres et me fournir une commande. Le temps a passé, j’attendais et les menaces de guerre ont mis fin à ces démarches. J’abordais donc à nouveau les académies et je travaillais pour le dessin à la Grande Chaumière et pour la sculpture je travaillais à l’Académie Rançon où Madame Cérésole m’avait fait un très bon accueil et m’avait fait une place et une faveur en me fournissant un certain outillage dans cette académie parce que quand je fus un habitué à l’Académie, des sculpteurs qui avaient appartenu à l’Académie Rançon, venaient rendre visite à Madame Cérésole presque quotidiennement et c’est ainsi que Madame Cérésole me présenta à Auricoste, Couturier, Ozouf et à un autre dont j’ai oublié le nom.

  •                -  Jean-Pierre Bénisti  :Tu as connu Pagava à ce moment-là ?
  •                -  Vera Pagava était une amie de Madame Cérésole. Quand les sculpteurs m’ont été présentés, ils m’ont demandé : « Mais qui êtes-vous ? » Je leur ai dit : « Je suis Bénisti – Ah ! Bénisti, Mais nous connaissons vos œuvres. Vous exposez tous les ans au Salon d’Automne et nous avons apprécié la qualité de vos œuvres. » Donc, j’étais connu de ces sculpteurs sans que d’Alger j’ai pu me douter que mes œuvres ont été regardées par des gens.
  •                -  D’ailleurs dans le dictionnaire des artistes français de Bénézit, tu es cité comme étant un artiste ayant exposé au Salon d’Automne dans les années 30 et c’est tout ce qu’on dit.
  •                -  C’est tout ce que Bénézit pouvait connaître de moi, puisque après il y eut la guerre et je n’ai plus eu l’occasion d’exposer au Salon d’Automne.
  •                -  Tu rencontres ces sculpteurs ?
  •                -  Qui deviennent mes amis.
  •                -  Et tu rends visite aux sculpteurs célèbres de l’époque.
  •                -  Un peu plus tard. Je peux dès à présent raconter une visite qui est restée dans ma mémoire. Le sculpteur Ozouf - qui était devenu mon ami, il m’avait invité à déjeuner plusieurs fois chez lui – me dit un jour : « Vous savez, Bénisti, il y a un sculpteur qui s’appelle Maillol et qui est très âgé – Il devait avoir soixante-quinze- soixante –seize ans à ce moment-là- Bénisti, je vous conseille d’aller le voir et d’aller visiter son atelier, parce qu’à cet âge-là, Maillol peut disparaître et vous n’aurez plus l’occasion de connaître cet homme qui non seulement est un sculpteur réputé de classe mais encore parce qu’il a un accueil très amusant et très chaleureux. » Il m’a montré en même temps la photographie de Maillol à une fête d’anniversaire où on lui avait offert un bouquet de fleurs et sur cette photographie j’ai vu le visage de Maillol saisissant ce bouquet et j’ai vu un grec, un homme de Grèce saisissant un bouquet. Un dimanche donc avec des amis, nous décidions donc d’aller du côté de Marly le roi où Maillol avait son atelier. On m’abandonna à Marly le roi chercher la maison de Maillol, ça n’a pas été difficile à trouver et je rentrais dans un jardin plutôt entretenu sauvagement mais très agréable avec des rosiers, un jardin de la banlieue parisienne et au fond du jardin était dressé un auvent de toile sous lequel un praticien grattait sur une statue de glaise presque terminée, cette statue de glaise portant des attelles à tous les endroits où la glaise tentait de flancher, mais des endroits qui sans doute étaient terminés
  •                -  Un praticien ou un plasticien ?
  •                -  Un praticien.
  •                -  Maillol lui-même avait été praticien chez Rodin.
  •                -  Il avait été praticien chez Rodin, et lui-même avait un praticien qui travaillait cette sculpture. Cette sculpture est devenue célèbre : C’est la montagne
  •                -  C’est une sculpture d’une femme assise et portant la main sur la tête.
  •                -  Elle est aux Tuileries actuellement. La femme est Dina Vierny.
  •                -  Ça, je ne sais pas. Il travaillait sur cette sculpture et je crois qu’il avait fait cette sculpture sans modèle. Donc je m’approchais du praticien et j’engageais la conversation avec lui. Il m’a dit qu’il était sculpteur belge et qu’actuellement il travaillait pour Maillol. Il m’a montré et il a continué son travail et a gratté sur sa sculpture. Puis je me suis promené dans le jardin et j’ai vu arriver dans le jardin un homme portant un chapeau de clown et j’ai vu arriver dans le jardin un homme portant un chapeau de clown avec une grande barbe sur une bicyclette et quand j’ai vu ses pieds pédalant sur la bicyclette, j’ai vu que cet homme était chassé de scandales hors desquelles aboutissaient des chaussettes reprisées. Pour un homme célèbre c’était un vêtement surprenant mais Maillol était comme ça. Il avait un chapeau grec, qui ressemblait à un chapeau de clown et il s’appelait Aristide. Il est descendu de sa bicyclette et me dit : « Qu’est-ce que vous voulez ? – Monsieur Maillol, * je viens vous voir parce qu’on m’a beaucoup parlé de vous. – Ah ! me dit-il, vous avez vu des photographies, je vous comprends et vous voulez voir comment je fais des photographies, - Oui, c’est exactement ça, mais je voulais aussi vous connaître. – Eh bien ! Vous me connaissez, approchez et regardez. » Maillol a pris un outil et s’est mis à gratter sur la sculpture, véritablement gratter parce que la glaise était dure, il grattait pour la polir ou trouver un grain et il engagea la conversation avec moi, il me dit : « C’est beau la sculpture, mais j’ai beau faire, je n’arrive pas à la qualité grecque. Oh ! Je suis été une fois en Grèce. J’ai pris le bateau et quand je me suis trouvé sur le bateau, la mer m’a secoué tellement, que je croyais vider mes entrailles, mais enfin je suis arrivé en Grèce et j’ai vu des merveilles et depuis je n’ai pas pu arriver à la qualité de Grèce. Mais si vous avez l’occasion, allez-y c’est la grande leçon pour les sculpteurs. » J’ai essayé d’imiter son accent, il était parisien et il n’avait jamais perdu son accent de Banyuls et des Pyrénées orientales. Au bout d’un moment, la conversation ayant tombée. Maillol me dit : « Est-ce que vous avez vu la petite maison où il y a mon atelier ?» Je dis: «Non – Allez-y, parce que moi, je travaille, allez-y vous verrez des choses intéressantes. » Alors je suis rentré dans cet atelier et j’ai vu sur des étagères une série de petites sculptures modelées par Maillol, certaines étaient très belles du point de vue esthétique, certaines n’étaient que des ébauches esthétiques, d’autres étaient des sculptures que l’on dirait aujourd’hui « pornographiques ». C’était des sculptures qu’il avait faites pour magnifier l’acte sexuel qui dans d’autres circonstances auraient été vulgaires, mais Maillol les avait traitées d’une telle manière et avec une telle recherche que véritablement ces sculptures étaient des œuvres d’art. Voilà ce que j’ai à dire de Maillol, je pourrais raconter d’autres aventures de Maillol.
  •                -  Il t’avait dit qu’un chef-d’œuvre est toujours découvert, même s’il est caché.
  •                -  Ah, oui ! Quand je suis sorti de la maison, il m’avait dit deux choses : « Qu’un chef-d’œuvre pouvait être caché, c’est toujours un chef-d’œuvre » et puis il m’a dit « Vous savez, si vous voulez, si vous vous mettez au bord de la route, personne ne vous empêchera de faire un chef-d’œuvre » ça c’est une morale, et après il m’a dit : « Écoutez, si vous faites un chef-d’œuvre, vous pouvez bien l’enterrer, un jour quelqu’un le découvrira et vous aurez fait votre chef-d’œuvre et le chef d’œuvre reprendra sa place, mais si vous n’avez pas fait un chef d’œuvre, cette œuvre retournera aux gravats. » C’est ça, en réalité que j’étais venu chercher chez Maillol, parce que c’est une philosophie de l’œuvre d’art qui est magnifique et dont on peut se souvenir longtemps quand on a continué à œuvrer.
  •                -  Tu as également rendu visite à Despiau.
  •                -  Oui, mais Despiau m’a reçu d’une manière très fraîche. Il a vu mes dessins et m’a dit : « C’est intéressant. Continuez ! »
  •                -  À Belmondo
  •                -  J’ai eu une aventure avec Belmondo, je n’ai pas à la raconter. Je connaissais Belmondo d’Alger. Il avait été très gentil avec moi, à Alger, très gentil. À Paris, il m’a reçu fraîchement et m’a dit : « Vous êtes à Paris. débrouillez- vous ! »
  •                -  Il y avait d’autres sculpteurs que tu avais connus là-bas. Il y avait Kretz, je crois ;
  •                -  Kretz était venu travailler à l’Académie Ranson et nous nous sommes liés d’amitiés. Il y avait eu une histoire. Kretz était étranger, les artistes comme Couturier et d’autres l’avaient jalousé et ne lui avaient pas fait un très bon accueil à Paris, si bien que Kretz vivait aussi d’expédients. Par la suite quand j’ai rencontré Kretz beaucoup plus tard, de nombreuses années après, Kretz avait réussi tout de même et il était professeur de sculpture à Reins.
  •                -  Tu voyais également Damboise.
  •                -  Damboise, je le connaissais d’Alger. Il y avait Damboise et Maguet que j’ai retrouvés à Paris. Damboise était très bien disposé avec moi, parce que je lui avais fait vendre à Alger quelques dessins et quelques sculptures. Maguet était très bien disposé avec moi, parce que j’avais rencontré Damboise et Maguet chez Jean Grenier. Je dois dire une chose, c’est que Damboise avait quelques commandes de sculptures pour lesquelles il travaillait, mais que Maguet était vraiment dans une grande misère, si bien que chez Maguet, j’ai entraîné Jeanne Sicard et Marguerite Dobren et je crois bien que Jeanne Sicard a acheté un Maguet.
  •                -  Il y avait aussi Epstein
  •                -  Je l’ai très peu connu ; Damboise me l’a présenté. C’était un très bon peintre. J’ai su par la suite que pendant la guerre, Epstein avait été arrêté par les Allemands et envoyé en camp de concentration.
  •                -  C’était le beau-frère de Damboise.
  •                -  C’était le beau-frère de Damboise.
  •                -  Maguet aussi est mort pendant la guerre.
  •                -  On sait qu’il est mort alors que son unité faisait une retraite sur le pont de Sully sur Loire. Il y a eu un bombardement dans lequel il y a eu peu de morts, mais Maguet a été touché par un éclat de bombe et il est mort.
  •                -  Tu voyais aussi Annie Tiné.
  •                -  Ah ! J’avais oublié que j’avais rencontré Annie Tiné, mais Annie Tiné, je l’ai rencontré grâce à Jean de Maisonseul. J’en parlerais beaucoup plus quand on abordera l’époque où Annie Tiné et moi, nous nous sommes mis à la recherche d’un atelier pour travailler ensemble.
  •                -  Il y avait différentes personnes que tu fréquentais et des maîtres à qui tu as rendu visite. Il y avait aussi des peintres. Je crois que tu voyais de temps en temps Mondzain qui était souvent de passage à Paris.
  •                -  Je le rencontrais de temps en temps. C’est lui qui m’a présenté à des peintres parisiens comme Schroeter.
  •                -  Tu as rendu une visite à Soutine.
  •                -  Non, je n’ai pas rendu visite à Soutine. Soutine me voyait constamment au café de la Rotonde. Un jour Soutine m’aborda et me dit : « Qu’est-ce que vous faites- là ? » Je lui ai dit : « Je suis sculpteur, mais je vous connais par les reproductions des œuvres que j’ai vues de vous et par la réputation que vous avez d’être un des meilleurs peintres actuels, je suis très heureux de vous rencontrer. Il me dit : « Venez me voir rue du Moulin Vert, je vous montrerais mon atelier. » Le temps a passé et je n’ai pas été chez Soutine. Mais je le rencontrais et il avait toujours un bon accueil pour moi.
  •                -  Il y avait aussi Jules Lellouche
  •                -  C’est à une autre époque. Mais je ne l’ai connu vraiment qu’après la guerre. Je connaissais la boutique en face de l’Académie de la Grande Chaumière, une boutique qui était tenu par un garçon sympathique qui s’appelait Gattégno et chez lequel on pouvait avoir des couleurs et un petit crédit pour acheter des toiles, des châssis, des choses de ce genre-là. C’est après la guerre que j’ai mieux connu Lellouche et Gattégno.
  •                -  Tu avais l’habitude d’aller dans des petits restaurants de quartier, notamment Wajda.
  •                -  Oui, on allait chez Wajda, chez Rosali, c’était bien. Chez Wajda, on mangeait pour pas trop cher mais il fallait attendre son tour pour avoir une table. Wajda était rue de la Grande Chaumière, à côté d’un grand marchand de couleurs, chez qui on allait et chez qui on pouvait avoir un petit crédit, c’était Castelluccio.
  •                -  Donc, tu fréquentais les artistes et tu as rencontré Jacques Heurgon à Paris ;
  •                -  J’en avais fait mon ami à Alger et je l’ai revu à Paris après la guerre.
  •                -  Il ne t’avait pas mis en relation avec Francis Ponge ?
  •                -  Tu as raison, un jour j’ai rencontré Jacques Heurgon, nous nous sommes fréquentés pendant un certain temps. Un jour il m’a donné rendez-vous à la Closerie des Lilas, il m’a présenté d’abord à Francis Ponge et à Jean Tardieu. Je les ai vus pendant un certain temps et ils ont un jour amené un de leur copain qui était en même temps poète qui s’appelait Pontrémoli. Pontrémoli, Ponge, Tardieu et Bénisti avaient rendez-vous tous les mardis soir à la Closerie des Lilas pour parler un moment de poésie et mettre au courant ce petit cénacle des œuvres que nous étions en train d’élaborer.
  •                -  Pontrémoli est mort à la guerre.
  •                -  Ah ! Pontrémoli n’est pas mort à la guerre. Pontrémoli a été menacé à Paris parce que Pontrémoli était juif. Pontrémoli s’est réfugié à Marseille. Et à Marseille, il y a eu une rafle et on ne sait pas ce qu’il est devenu. Il a disparu, c’est un désastre.
  •                -  Tu as rendu visite à Vladimir Jankélévitch
  •                -  C’est une autre histoire. J’ai connu Vladimir Jankélévitch. Jankélévitch ne m’a pas oublié. Chez Heurgon à Alger, nous avons connu trois jeunes filles qui avaient un nom un petit peu particulier, trois jeunes filles Lanusse. Il y avait une jeune fille qui avait une infirmité à la main et qui était très liée à Heurgon. Une autre sœur d’une très grande beauté et que nous avions fréquentée à un certain moment. Un jour j’ai rencontré la fille qui était extrêmement belle en compagnie d’un jeune homme qui avait de grands cheveux et de grands yeux tendres et un peu sévère. Et Mademoiselle Lanusse m’a présenté Monsieur Vladimir Jankélévitch, professeur de philosophie et critique musical. Mademoiselle Lanusse m’a annoncé son prochain mariage avec Jankélévitch. Nous étions sur un des quais de l’île Notre-Dame et nous avons marché un certain temps ensemble en devisant, en racontant des histoires d’Algérie, en exposant les différents motifs de nos œuvres, quand nous sommes arrivés à une porte donnant sur le trottoir. Jankélévitch a ouvert la porte nous a fait rentrer et m’a prié de s’asseoir, il s’est mis à l’aise. Mademoiselle Lanusse a enlevé son manteau et Jankélévitch s’est mis au piano et nous a fait passer un après-midi musical absolument inattendu et merveilleux. Voilà comment j’ai connu Jankélévitch que j’ai revu quelques jours après, quelques temps après, plusieurs fois et puis je l’ai perdu de vue quand la guerre est arrivée. Je sais que Jankélévitch a passé la guerre dans le midi de la France et qu’il est revenu après la guerre n’ayant pas été inquiété par les Allemands.
  •                -  Nous en resterons là pour aujourd’hui.

           

            Dans un autre entretien, Louis Bénisti m’avait raconté que dans l’atelier de Maillol, il y avait au milieu des sculptures, ce que l’on appelle des creux, c'est-à-dire des moulages prenant les empreintes du corps, permettant ensuite d’avoir un moulage complet du corps. Pour faire un creux, il faut enduire de savon le corps du sujet à mouler, afin de l’isoler du plâtre. Un des creux avaient gardé au milieu du plâtre quelques poils qui avaient été arrachés à la touffe de la femme insuffisamment savonnée.

            Lorsque, alors que j’étais enfant, j’accompagnais mon père à Paris pendant les vacances d’été, nous faisions souvent la tournée des galeries du Quartier-latin. Nous rentrions souvent dans la galerie Dina Vierny, rue Jacob, où nous étions reçus par une dame un peu forte, fumant des petits cigarillos.  Sur les cimaises, étaient exposées des peintures naîves de Beauchant, de Bombois ou d’autres…Dans les vitrines, il y avait des petites sculptures de Maillol. Mon père discutait souvent avec cette dame. Ils parlaient de Maillol ou de peinture naïve. Le nom de Bénaboura avait d’ailleurs été cité. Je ne savais pas encore que cette galeriste avait été le modèle de Maillol. 

            Dans des notes de février 1995, Louis Bénisti , sur son lit d’hôpital, sentant son départ proche, essaya de réécrire ses souvenirs et dit à propos de sa visite à Maillol : « Maillol roulant les r et les talons dans des tartines provinciales roulant sur une bicyclette rouillée :
 « - Que venez-vous faire ici ? Ne seriez-vous pas un de ces malhonnêtes qui entrent sans frapper. 
- Je fais un peu de sculpture et je viens de la part de Monsieur Ozouf. - Ah ! Bon !  »

            .(Notes de JP Bénisti)

 

Photo JPB 1968

Photo JPB 1968

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20 mars 2022 7 20 /03 /mars /2022 17:08

Texte écriit en 2012 pour le cinquantenaire des accords d'Évian

 

Au moment où  le cinquantenaire des accords d’Evian fait l'objet d'une timide célébration , l’Algérie reste présente dans nos esprits. La multiplication des émissions, consacrées à cette guerre ,en témoigne.


Benjamin Stora nous a démontré qu’il ne fallait pas confondre mémoire et histoire et que si l’histoire est une, les mémoires sont multiples et peuvent se contredire. Peut-être qu’il n’y a pas encore d’histoire de la guerre d’Algérie avec une grande Hache (1), mais l’histoire des historiens n’est pas celle vécue  par les  habitants de l’Algérie. 

Un jour, un pied noir qui avait édité à compte d’auteurs son journal des dernières années de sa vie algéroise m’offrit son ouvrage et à la lecture, je remarquais que les évènements dont il faisait état ne correspondaient pas du tout à ceux que j’avais retenus. Son histoire m’était presque étrangère. 

  

Des malentendus subsistent encore. Il ne faut pas oublier que l’affaire algérienne n’a pas été un drame, mais une tragédie. Dans un drame, tout le monde a tort. Dans une tragédie, tout le monde a raison.

 

Il est courant de rejeter la responsabilité de la guerre d’Algérie a une minorité de Français d’Algérie exploiteurs et faisant « suer le burnous » Cela n’est pas exact. La plupart des Européens d’Algérie avaient des revenus inférieurs aux revenus de leurs collègues métropolitains et n’exploitaient personne. Cependant un pied-noir, même pauvre, avait toujours un plus pauvre que lui qui était musulman. D’autre part le colonialisme est un système et les pieds-noirs,  tout en n’étant pas  de ce système, se sont retrouvés responsables de ce système   par délégation et de fait, les victimes expiatoires. 

  

À la lecture des témoignages sur la guerre d’Algérie apparaissent une succession de faits qui semblent  isolés les uns des autres et  qui ne peuvent se comprendre que si on en perçoit les liens. 

            Des aspects des évènements survenus durant la fin de la guerre d’Algérie ne semblent pas avoir attiré l’attention des journalistes : 

1° S’il existait une guerre franco-algérienne ou plutôt une guerre entre l’armée française et le FLN, il existait de part et d’autre deux autres conflits ; un conflit franco-français entre les français favorables à l’OAS et tous les autres qui étaient légalistes et un conflit interne à l’intérieur du FLN, qui a éclaté peu de temps après les premiers entretiens d’Évian. Jean-Jacques Servan Schreiber disait dans l’Express :"Nous devons choisir entre le FLN à Alger ou l’OAS à Paris. "Le choix était clair. Cela explique certaines positions extrêmes comme celle de Sartre qui dans sa préface aux Damnés de la terre de Frantz Fanon lançait un véritable appel au meurtre. (2). La guerre d’Algérie devenait un problème politique intérieur à la France. 

2° L’action de l’OAS en Algérie après l’échec du pronunciamento d’avril 1961 a entraîné un pourrissement de la situation, exigeant de la part des autorités françaises une solution de type chirurgical entraînant naturellement des victimes collatérales. Les pieds-noirs et les harkis en ont fait les frais. 

3° Un livre récent sur les pieds-noirs restés en Algérie (3) laisse supposer que l’OAS est seule responsable du départ massif de la majorité des pieds-noirs et que leur maintien dans l’Algérie indépendante demeurait possible. 

Cela n’est pas tout à fait exact. Tous les pieds-noirs ont dû quitter leur maison durant les années 1961 et 1962. Tout d’abord les pieds-noirs libéraux, menacés par l’OAS ont  quitté  le pays pour des raisons évidentes. Après le terrorisme exercé par l’OAS sur la population musulmane, les pieds-noirs se sont dit que lorsque l’Algérie sera indépendante,, les Algériens seront prêts à les étriper. Saisis par la peur, ils se sont précipités sur les bateaux et les avions. 

Beaucoup de pieds-noirs songeant à rentrer en Algérie après leurs départ précipité y ont renoncé du fait de l’insécurité régnant en Algérie pendant l’été 62 et de la guerre entre willayas. Un certain nombre de pieds-noirs décidèrent cependant de rentrer 

Il y avait effectivement au moment de  la rentrée scolaire de 1962-63 environ deux cent mille pieds-noirs, quelques années après ils devaient peut-être en rester dix mille et les Algériens n’ont pas réussi à les maintenir. 

  

                                                                                  Jean-Pierre Bénisti 

  

  

  1.   Selon Georges Pérec 
  2. « Car, en premier temps de révolte, il faut tuer. Abattre un Européen c’est faire d’une pierre deux coups, supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé. Restent un homme mort et un homme libre ; le survivant, pour la première fois, sent un sol national sous la plante des pieds. ») Vu la situation présente en Algérie, nous ne saurons considérer cette pensée comme une formule de rhétorique, et c’était un véritable appel au meurtre. Le livre de Fanon était cependant intéressant, notamment sur l’influence du conflit algérien, sur la pathologie mentale.
  3. Pierre DAUM : Ni valise, ni cercueil. Actes-Sud. Paris 2012.
Évian et le lac Léman (Photo JPB 1971)

Évian et le lac Léman (Photo JPB 1971)

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14 mars 2022 1 14 /03 /mars /2022 09:04

Feraoun était un ami de ma famille. Je l’avais rencontré lorsque j’étais au lycée. Il fréquentait la librairie tenue à Alger par Edmond Charlot. La dernière fois que je l’ai vu, c’était en mai 1961, juste après le pronunciamento du 22 avril. C’était au cours de la projection du film de Jean-Marie Drot2 sur Albert Camus, dans lequel il intervenait Je lui avais montré les photos du Centre Culturel Albert-Camus, bâti par Miquel et Simounet à Orléansville (Chlef aujourd’hui), de la stèle que l’on venait d’inaugurer à Tipasa et quelques autres photos comme celle d’un graphito  à la craie où l’on pouvait lire OAS, que j’avais prise en raison des qualités du dessin. Il avait été fort amusé par cette photo. 

Mes parents avaient été très attristés par sa disparition en même temps que ses compagnons, qui à la veille de la fin de la guerre d'Algérie jouaient le rôle de ponts entre les communautés. Cet attentat venait peu après celui qui avait atteint en novembre 1961 Maurice Perrin, militant de la Trève civile et l'instituteur Noël Linarès en février 1962.

        Roblès avait dit que Feraoun était à la Kabylie ce que Lorca était à l’Andalousie. Il ne se doutait pas que Feraoun  (en 1962) et Lorca (en 1938) eurent le même destin, tous deux victimes de l'intollérance,. Plus tard, d’autres poètes furent assassinés sur la terre algérienne : Jean Sénac, et plus tard Youssef Sebti, Laadi Flici,  Tahar Djaout et bien d’autres. 

 

                                                                       Jean-Pierre Bénisti

 

 

Voir :

 

https://histoirecoloniale.net/Mouloud-Feraoun-un-ecrivain-dans.html

 

 

 

https://www.sam-network.org/video/mouloud-feraoun-sur-albert-camus

 

 

https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/i07058700/max-pol-fouchet-presente-le-journal-de-mouloud-feraoun

 

https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/i10097466/chronique-de-max-pol-fouchet-sur-albert-camus

 

 

https://www.aurelia-myrtho.com/article-a-propos-de-mouloud-feraoun-70123941.html

 

https://www.aurelia-myrtho.com/article-a-ne-pas-manquer-numero-special-feraoun-104099765.html

 

Alger 1961 Photo JPB

Alger 1961 Photo JPB

Les Lettres Françaises Mars 1962

Les Lettres Françaises Mars 1962

Les Lettres Françaises Mars 62

Les Lettres Françaises Mars 62

Feraoun et Camus Entretien avec Guy Basset Revue l'Iivresq Alger, 2012

Il y a soixante ans, Mouloud Féraoun et ses compagnons étaient assassinés
Le Journal d'Alger 6 janvier 1960

Le Journal d'Alger 6 janvier 1960

Il y a soixante ans, Mouloud Féraoun et ses compagnons étaient assassinés

Féraoun par Emmanuel Roblès.

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8 février 2022 2 08 /02 /février /2022 09:21

Un matin fin janvier, les enseignants firent deux heures de grève contre le terrorisme et pour la paix en Algérie. Les cours s’arrêtèrent à dix heures. Libéré de ma présence au lycée, où j’étais en terminale, je me suis rendu avec des camarades à la Mutualité où un meeting avait  lieu. Le doyen Georges Vedel fit un très grand discours sur les libertés menacées par la poursuite de la guerre d’Algérie. On fit l’éloge de l’engagement des intellectuels contre la guerre d’Algérie et notamment au sein du Comité Maurice Audin. Georges Vedel, brillant professeur de Droit constitutionnel entra par la suite à l’Académie française ; à sa mort, son fauteuil sera occupé par Assia Djebbar, qui ne mentionna pas dans son discours l’action de Vedel pour la paix en Algérie.

 

            L’OAS frappait à Alger en plastiquant les personnes qui n’étaient pas favorables à leur politiques set en assassinant leurs opposants. Beaucoup d’amis en voulaient terriblement à De Gaulle d’avoir laissé se former ce mouvement dans le but de pourrir la situation et de peser sur les négociations avec le FLN. Cette stratégie du pourrissement de la situation était tout à fait déplaisante. En France, l’OAS n’assassinait pas encore beaucoup, mais plastiquait les appartements des intellectuels et des professeurs de Facultés : Laurent Swartz, Alfred Kastler, futur prix Nobel, Roger Godement, Georges Gurvitch etc.…Un soir, elle essaya de frapper l’auteur de la Condition humaine : une charge de plastic fut déposée devant l’appartement de Malraux. Ce n’est pas le ministre qui fut atteint mais sa voisine, une petite fille Delphine Renard qui eut une grave blessure au visage. Devant l’indignation de la population parisienne, les partis de gauche appelèrent à manifester le soir même, de la Bastille à la République. Des tracts étaient distribués le matin du 8 février.  Papon, comme d’habitude, prétexta l’atteinte à l’ordre publique pour interdire la manifestation. Je me suis rendu aux abords de la Bastille pour voir l’évolution de la situation. J’ai essayé de voir des bouts de manifestations essayer d’avancer, en simple spectateur, sans me joindre aux manifestants. Les flics frappaient les manifestants qu’ils trouvaient sur leurs passages et entraînaient des bousculades dans la foule. Les manifestants dispersés par la force se trouvaient sans contrôle et pouvaient se livrer à des exactions. J’ai pris donc le métro et je suis rentré à Montmartre., où je logeais. La radio nous apprit que huit manifestants avaient été mortellement blessés aux alentours du métro Charonne. Beau travail ! Monsieur Papon ! Les ordres donnés aux policiers de réprimer les manifestants ont entraîné une gigantesque bousculade précipitant les passants, manifestants ou non, vers les bouches de métro qui étaient fermées par mesure de sécurité.  Heureusement que ce sinistre préfet de police soit parti en retraite juste avant Mai 68. Un préfet de police d’une autre qualité, Maurice Grimaud réussit à limiter les dégâts au cours des nombreuses manifestations parisiennes. Les responsables actuels de la police devraient s’inspirer de ce préfet.

 

. Nous étions naturellement très en colère de l’attitude du pouvoir gaulliste, vis-à-vis des militants pacifistes de gauche. En fait, et cela je l’ai compris bien plus tard. De Gaulle pour mettre fin à la crise algérienne voulait se passer d’un soutien de personnes venant d’une gauche dominée par le PC. Après ces événements, il était très difficile pour des personnes de gauche d’accorder le moindre soutien à la politique gaulliste, même si elle approuvait la politique algérienne.

            Le mardi 13 février, je me suis rendu au lycée Jacques Decour, où les professeurs comme les élèves étaient invités à se mettre en grève. J’ai donc rejoint mes camarades à la porte du lycée et nous nous sommes rendus à la République dans le but de nous joindre au cortège funèbre qui accompagnait les victimes au cimetière du Père Lachaise. Nous avons attendu sur les trottoirs de l’avenue Parmentier le passage du cortège composé d’abord du fourgon mortuaire, puis d’une fanfare jouant la marche funèbre de Chopin, puis huit jeunes portant les photos géantes des huit victimes, ensuite les familles des victimes en habit de deuil, enfin les représentants des syndicats et des partis politiques.  Il était facile de remarquer la délégation du PC avec Jacques Duclos, Waldeck Rochet et Jeannette Vermeersch, la délégation du PSU avec Édouard Depreux, André Philip et Pierre Mendès-France dont la présence fut très remarquée. Après le passage des officiels, nous avons rejoint la longue foule anonyme. Le journal, l’Humanitéparla d’un million de personnes, la préfecture de police estima le nombre des présents à cinquante mille. En fait nous devions être un demi-million. Arrivé à la porte du Père Lachaise., nous devions écouter les discours des responsables syndicaux, comme Paul Ruff, de la FEN, que mes parents avaient bien connu à Alger, à l’époque où il enseignait dans un cours privé fondé à l’intention des élèves israélites mis à la porte des lycées par les autorités vichystes.  Le temps de ce 13 février était assez gris. Vers midi le soleil se leva et les oiseaux se mirent à chanter pour accompagner les discours des orateurs. Après les discours, nous avons atteint le mur des fédérés où les victimes ont été inhumées. Face au mur, les gerbes déposées formaient un gigantesque parterre de fleurs.

 

 

Jean-Pierre Bénisti

 

Voir :

Alain Dewerpe (1952-2015) : Charonne 8 février 1962 : Anthropologie historique d’un crime d’état. Gallimard. Paris 2006. 897 p. 

Christian ChevandierPoliciers dans la ville : une histoire des gardiens de la paix, Paris, Gallimard, coll. « Folio, Histoire » (no 198), 2012, 1004 p. (

Delphine Renard: Tu choisiras la vie, Paris, Éditions Grasset et Fasquelle. 2013

 

8 février 1962  : Une Paponnade

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