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17 juin 2013 1 17 /06 /juin /2013 09:43

Voir le bel aeticle d'Hele Beji dans le Monde du 15 juin 2013

http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/06/15/amina-l-histoire-en-marche_3430135_3232.htmlamina-femen-2 (1)

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9 juin 2013 7 09 /06 /juin /2013 12:49

Peu d''hommes politiques suscitaient  l'admiration de ses amis comme de ses adversaires. Il a rétabli l'honneur et la dignité à un Parti Socialiste, qui s'était compromis dans une politique coloniale désastreuse.

Il a largement contribué à la victoire de la gauche le 10 mai 1961.

Salut vieux camarade !

                                       Jean-Pierre Bénisti

 

 

Article de Jean Daniel :

http://tempsreel.nouvelobs.com/politique/20130608.OBS2523/notre-pierre-mauroy.html

 

 

 

Blog d'Antoine Blanca

http://inter-socialiste.over-blog.com/article-mauroy-le-modernisateur-du-socialisme-fran-ais-118358689.html

 

 

 

Le Monde :

http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2013/06/07/majeste-mauroy-je-vois-la-mort-comme-jai-vu-la-mer-pour-la-premiere-fois/

 

 

 

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1 mai 2013 3 01 /05 /mai /2013 10:59

Pour que demeure le secret

Nous tairons jusqu’au  silence

Nul oiseau n’est coupable

Du tumulte de nos cœurs

La nuit n’est responsable

De nos jours au fil de mort

Il n’est que grande innocence

Et de colonnes en marche

Mais les plaines soulignent

Notre solitude de leur blé.


Max-Pol Fouchet

Demeure le secret.


Il y a cent ans le 1er mai 1913 naissait à Saint-.Vaast la Hougue en Normandie

Il passa sa jeunesse à Alger et fut l’ami de Jean de Maisonseul, de Louis Bénisti  de  Louis Miquel d’Edmond Charlot et d’Albert Camus.  Nous devons le remercier d’avoir publié le -fameux poème de Paul Éluard : Liberté , dans Fontaine, la grande revue littéraire qu’il dirigeait à Alger. Aujourd’hui, les enfants connaissent ce poème par cœur .

Il fut un formidable diffuseur de culture, créateur des émissions littéraires à la télévision  et aussi un grand poète.

 

Voir :

 

http://www.maxpolfouchet.com/

 

http://blogs.mediapart.fr/blog/anne-duvivier/290413/max-pol-fouchet-une-certaine-idee-du-journalisme

 

 

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Lithographie de René-Jean Clot  illustrant  Histoires  saintes de Max-Pol Fouchet, Èditions Bacconier, Alger, 1934,

 

 

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1 mai 2013 3 01 /05 /mai /2013 07:59

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Dessin de Louis Bénisti 1937

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25 avril 2013 4 25 /04 /avril /2013 18:03

«  On a souvent comparé l’action de la sélection naturelle à celle d’un ingénieur. Mais la comparaison ne semble guère heureuse. D’abord parce que, contrairement à l’évolution, l’ingénieur travaille sur plan, selon un projet longuement mûri. Ensuite parce que, pour fabriquer une structure nouvelle, l’ingénieur ne procède pas nécessairement à partir d’objets anciens. L’ampoule électrique ne dérive pas de la chandelle, ni le réacteur du moteur à explosion. Pour produire un nouvel objet, l’ingénieur dispose à la fois de matériaux spécialement affectés à cette tâche et de machines uniquement conçues dans ce but. Enfin, parce que les objets produits par l’ingénieur, du moins par le bon ingénieur, atteignent le niveau de perfection qu’autorise la technologie de son époque. L’évolution, au contraire, reste loin de la perfection, comme l’a constamment répété Darwin qui avait à combattre l’argument de la création parfaite. Tout au long de l’Origine des Espèces, Darwin insiste sur les imperfections de structure et de fonction du monde vivant. Il ne cesse de souligner les bizarreries, les solutions étranges qu’un Dieu raisonnable n’aurait jamais utilisées. Et l’un des meilleurs arguments contre la perfection vient de l’extinction des espèces. On peut estimer à plusieurs millions le nombre des espèces animales vivant actuellement. Mais le nombre des espèces qui ont disparu après avoir peuplé la terre à une époque ou une autre doit, d’après un calcul de G.G. Simpson s’élever à quelque cinq cents millions au moins.

 

   L’évolution ne tire pas ses nouveautés du néant. Elle travaille sur ce qui existe déjà, soit qu’elle transforme un système ancien pour lui donner une fonction nouvelle, soit qu’elle combine plusieurs systèmes pour en échafauder un autre plus complexe. Le processus de sélection naturelle ne ressemble à aucun aspect du comportement humain. Mais, si l’on veut jouer avec une comparaison, il faut dire que la sélection naturelle opère à la manière non d’un ingénieur, mais d’un bricoleur ; un bricoleur qui ne sait pas encore ce qu’il va produire, mais récupère tout ce qui lui tombe sous la main, les objets les plus hétéroclites, bouts de ficelle, morceaux de bois, vieux cartons pouvant éventuellement lui fournir des matériaux; bref, un bricoleur qui profite de ce qu’il trouve autour de lui pour en tirer quelque objet utilisable. L’ingénieur ne se met à l’œuvre qu’une fois réunis les matériaux et les outils qui conviennent exactement à son projet. Le bricoleur, au contraire, se débrouille avec des laissés-pour-compte. Le plus souvent les objets qu’il produit ne participent d’aucun projet d’ensemble. Ils sont le résultat d’une série d’événements contingents, le fruit de toutes les occasions qui se sont présentées d’enrichir son bric-à-brac. Comme l’a souligné Claude Lévi-Strauss, les outils du bricoleur, contrairement à ceux de l’ingénieur, ne peuvent être définis par aucun programme. Les matériaux dont il dispose n’ont pas d’affectation précise. Chacun d’eux peut servir à des emplois divers. Ces objets n’ont rien de commun si ce n’est qu’on peut en dire « Ça peut toujours servir. » A quoi? Ça dépend des circonstances.

   A maints égards, le processus de l’évolution ressemble à cette manière de faire. Souvent sans dessein à long terme, le bricoleur prend un objet dans son stock et lui donne une fonction inattendue. D’une vieille roue de voiture, il fait un ventilateur; d’une table cassée, un parasol. Ce genre d’opération ne diffère guère de ce qu’accomplit l’évolution quand elle produit une aile à partir d’une patte, ou un morceau d’oreille avec un fragment de mâchoire. [...]

   L’évolution procède comme un bricoleur qui, pendant des millions et des millions d’années remanierait lentement son œuvre, la retouchant sans cesse, coupant ici, allongeant là, saisissant toutes les occasions d’ajuster, de transformer, de créer. Voici un exemple comment, selon Ernst Mayr, s’est formé le poumon des vertébrés terrestres. Son développement a commencé chez certains poissons d’eau douce qui vivaient dans des mares stagnantes, donc pauvres en oxygène. Ces poissons prirent l’habitude d’avaler de l’air et d’absorber de l’oxygène à travers la paroi de leur œsophage. Dans de telles conditions, tout élargissement de cette paroi se traduisait par un avantage sélectif. Il se forma ainsi des diverticules de l’œsophage qui, sous l’effet d’une pression de sélection continue, s’agrandirent peu à peu pour se transformer en poumons. L’évolution ultérieure du poumon ne fut qu’une élaboration de ce thème, avec l’accroissement de la surface utilisée pour le passage de l’oxygène et pour la vascularisation. Fabriquer un poumon avec un morceau d’œsophage, cela ressemble beaucoup à faire une jupe avec un rideau de grand-mère.

   Différents ingénieurs, qui s’attaquent au même problème, ont toutes les chances d’aboutir à la même solution toutes les voitures se ressemblent, comme se ressemblent toutes les caméras et tous les stylos. En revanche, différents bricoleurs qui s’intéressent à la même question lui trouvent des solutions différentes, selon les occasions qui s’offrent à eux. Il en est de même pour les produits de l’évolution, comme le montre par exemple la diversité des yeux trouvés dans le monde vivant. De toute évidence, posséder des photorécepteurs confère un grand avantage dans de nombreuses situations. Au cours de l’évolution, l’oeil est apparu sous des formes très diverses, fondées sur au moins trois principes physiques différents : lentille, trou d’aiguille et tubes multiples. Les plus raffinés, comme les nôtres, sont les yeux à lentille formant image; l’information qu’ils fournissent ne porte pas seulement sur l’intensité de la lumière, mais aussi sur les objets d’où vient la lumière, sur leur forme, couleur, position, mouvement, vitesse, distance, etc. Des structures aussi élaborées sont nécessairement fort complexes. Elles ne peuvent donc se développer que chez des organismes eux-mêmes déjà complexes. On pourrait alors croire qu’il existe une façon et une seule de produire pareille structure. Mais il n’en est rien. L’oeil à lentille est apparu deux fois au moins, chez les mollusques et les vertébrés. Rien ne ressemble autant à notre oeil que l’oeil de la pieuvre. Tous deux fonctionnent presque exactement de la même manière. Et pourtant ils n’ont pas évolué de la même manière. Chez les mollusques, les cellules photoréceptrices sont dirigées vers la lumière et chez les vertébrés en sens inverse. Parmi toutes les solutions trouvées au problème des photorécepteurs, ces deux-là se ressemblent sans toutefois être identiques. Dans chaque cas, la sélection naturelle fait ce qu’elle peut avec les moyens du bord.

   Enfin, contrairement à l’ingénieur, le bricoleur qui cherche à améliorer son œuvre préfère souvent ajouter de nouvelles structures aux anciennes plutôt que de remplacer celles-ci. Il en est fréquemment de même avec l’évolution, comme le montre notamment le développement du cerveau chez les mammifères. Le cerveau, en effet, ne s’est pas développé selon un processus aussi intégré que, par exemple, la transformation d’une patte en aile. Au vieux rhinencéphale des mammifères inférieurs s’est ajouté un néocortex qui rapidement, peut-être trop rapidement, a joué le rôle principal dans la séquence évolutive conduisant à l’homme. Pour certains neurobiologistes, notamment McLean, ces deux types de structures correspondent à deux types de fonctions; mais elles n’ont été ni coordonnées, ni hiérarchisées complètement. La plus récente, le néocortex, commande l’activité intellectuelle et cognitive. La plus ancienne, venue du rhinencéphale, gouverne les activités viscérales et émotives. Cette vieille structure qui tenait les rênes chez les mammifères inférieurs a été en quelque sorte reléguée au magasin des émotions, Chez l’homme, elle constitue ce que McLean appelle le « cerveau viscéral ». Le développement de l’être humain se caractérise par une extrême lenteur qui entraîne une maturité tardive. C’est peut-être pour cette raison que les vieilles structures cérébrales ont conservé d’étroites connexions avec les centres autonomes inférieurs, qu’elles continuent à coordonner des activités aussi fondamentales que la recherche de nourriture, la chasse au partenaire sexuel ou la réaction devant un ennemi. Formation d’un néocortex dominant, maintien d’un antique système nerveux et hormonal, en partie resté autonome, en partie placé sous la tutelle du néocortex, tout ce processus évolutif ressemble fort à du bricolage. C’est un peu comme l’installation d’un moteur à réaction sur une vieille charrette à cheval. Rien d’étonnant s’il arrive des accidents ».

 

                                 François JACOB. Le Jeu des Possibles.1981.

 

Article printed from PhiloLog: http://www.philolog.fr

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31 mars 2013 7 31 /03 /mars /2013 13:34

 

Sur le marché de Lyon, un boulanger vendait hier la brioche traditionnelle que les pieds-noirs avaient l’habitude de faire pour Pâques :la Mouna. En Algérie, traditionnellement les pieds-noirs avaient l’habitude de fêter la venue du printemps en allant le lundi de Pâques déjeuner sur l’herbe et de terminer le repas par la dégustation d’une tranche de mouna, brioche en forme de dôme, faite avec de la farine, de la levure  et parfumée à la fleur d’oranger. Si la mouna est plutôt de tradition chrétienne, les juifs fêtaient à la même période, la fin de la semaine de Paque (Pessah qui signifie passage)) au cours d’une journée appelée Mimouna, où on ramène à la maison des épis de blé pour saluer les moissons nouvelles et on mange à nouveau du pain cuit avec du levain, après avoir mangé pendant lui jours de la galette ou pain azyme.

            Je n’ai jamais su l’origine de ces deux termes voisins mouna et mimouna et aucun de mes amis initiés dans les trois religions monothéistes, n’a pu me donner une explication.

            De même, personne n’a réussi à me dire pourquoi le calendrier chrétien est un calendrier solaire au niveau des fêtes fixes : Noêl, Jour de l’an et Toussaint et lunaires dans les fêtes mobiles, Mercredi des Cendres, Vendredi Saint, Pâques, Ascension, Pentecôte,etc.…

 

                                   Jean-Pierre Bénisti

 

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14 mars 2013 4 14 /03 /mars /2013 15:43

Phillipe Rebeyrol a été attaché à l'ambassade de France en Algérie dans les années 60 en même temps que Stéphane Hessel. Le séjour de ces deux diplomates dans la capitale algérienneÉ a porté ses fruits puisque leurs enfants Antoine Hessel et Nathalie Rebeyrol se sont mariés. Phillipe Rebeyrol est décédé le 11 mars 2013, deux semaines après Stéphane Hessel.

Rebeyrol avait écrit en 1983 un article sur son ami Jean Sénac

publié dans Le Soleil Fraternel, actes du colloque Jean Sénac et la nouvelle poésie algérienne d'expression française (septembre 1983) Éditions du Quai Jeanne Laffite, Marseille, 1985,) ISbN 2 86604 012 0

 

 

 

 

 

 

 

 

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8 février 2013 5 08 /02 /février /2013 19:22

Aux dernières nouvelles, des prétendus historiens d’art auraient découvert le visage de la femme peinte dans l’Origine du monde de Courbet. Le peintre aurait découpé son tableau et aurait fait deux : la tête de la femme et  ce qu’il en reste constituant le tableau connu.

En supposant  que cette hypothèse de découpage soit  exacte, cela ne change pas notre regard sur le tableau. La pratique des découpages est fréquente chez les peintres et si Courbet a découpé son tableau, il l’a fait à dessein, n’ayant pas jugé bon de conserver le visage de la femme. Nous devons voir le tableau, tel qu’il est aujourd’hui et ne pas essayer d’imaginer un prolongement quelconque. Si le tableau représentait la femme dans sa totalité, l’esprit du tableau serait tout différent car ce qui est surprenant dans ce tableau, ce n’est pas ce qu’il représente mais  c’est le fait que ce n’est pas seulement l’observateur qui regarde le tableau mais c’est le  sexe velu  de la femme représentée  sur le tableau qui regarde son public. Ce regard est accentué par l’absence de visage du modèle peint. 

 

Jean-Pierre Bénisti

 

 


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31 décembre 2012 1 31 /12 /décembre /2012 14:48

Henri Chouvet (1906-1987),  sculpteur et graveur originaire de La Ciotat ayant travaillé en Algérie ne s'est jamais pris tout à fait au sérieux. Il avait toujours l'habitude d'organiser les soirées de réveillon et savait faire partager sa bonne humeur et avait créé au moment où les évènements étaient particulièrement tristes le club (virtuel) des çavassarrangistes . Tous les membres du club devaient dire en se levant le matin : "Ça va s'arranger!"  Au moment du passage d'une année à l'autre il nous faisait chanter a capela un petit cantique :

Le jour de l'an approche,

C'est le jour le plus beau,

On cherche dans sa poche,

Pour faire un petit cadeau,

Moi qui n'ai rien au monde

Pas même un petit écu,

Ma pièce la plus ronde,

C'est le trou de mon cul.

Peu de temps avant son décès, il m'avait envoyé un collage avec comme légende

Chouvet935-1.jpg

 

Trêve !avons nous pensé des micro-horizons

Faisons jaillir les culs  de leurs belles prisons 

Et passant le flambeau sur vos fesses charnues       

Rechargeons les accus.

  Il finit sa vie à Paris et avec son ami le peintre et graveur Jean Signovert, il fit surtout des gravures. Il mourut en septembre 1987.

 

                                                                                                         Jean-Pierre Bénisti

 

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La Belle époque (Gravure 1980)

 

Paris-77690.jpg

 

Henri Chouvet dans son atelier de Montmartre en avril 1977(Photo JPB)

 

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24 décembre 2012 1 24 /12 /décembre /2012 23:17

Que l’adulte français voit l’Enfant comme un autre lui-même, il n’y en a pas de meilleur exemple que le jouet français. Les jouets courants sont essentiellement un microcosme adulte ; ils sont tous reproductions amoindries d’objets humains, comme si aux yeux du public l’enfant n’était en somme qu’un homme plus petit, un homunculus à qui il faut fournir des objets à sa taille.

Les formes inventées sont très rares : quelques jeux de construction, fondés sur le génie de la bricole, proposent seuls des formes dynamiques. Pour le reste, le jouet français signifie toujours quelque chose, et ce quelque chose est toujours entièrement socialisé, constitué par les mythes ou les techniques de la vie moderne adulte : l’Armée, la Radio, les Postes, la Médecine (trousses miniatures de médecin, salles d’opération pour poupées), l’École, la Coiffure d’Art (Casques à onduler),1’Aviation (parachutistes), les transports (Trains, Citroën, Vedette, Vespa, Stations-services), la Science (Jouets martiens).

Que les jouets français préfigurent littéralement l’univers des fonctions adultes ne peut évidemment que préparer l’enfant à les accepter toutes, en lui constituant avant même qu’il réfléchisse l’alibi d’une nature qui a créé de tout temps des soldats, des postiers et des vespas. Le jouet livre ici lecatalogue de tout ce dont l’adulte ne s’étonne pas : la guerre, la bureaucratie, la laideur, les Martiens, etc. Ce n’est pas tant, d’ailleurs, l’imitation qui est signe d’abdication, que sa littéralité : le jouet français est comme une tête réduite de Jivaro, où l’on retrouve à la taille d’une pomme les rides et les cheveux de l’adulte. Il existe par exemple des poupées qui urinent ; elles ont un oesophage, on leur donne le biberon, elles mouillent leurs langes ; bientôt, sans nul doute, le lait dans leur ventre setransformera en eau. On peut par là préparer la petite fille à la causalité ménagère, la « conditionner » à son futur rôle de mère. Seulement, devant cet univers d’objets fidèles et compliqués, l’enfant ne peut se constituer qu’en propriétaire, en usager, jamais en créateur ; il n’invente pas le monde, il l’utilise : on lui prépare des gestes sans aventure, sans étonnement et sans joie. On fait de lui un petit propriétaire pantouflard qui n’a même pas à inventer les ressorts de la causalité adulte ; on les lui fournit tout prêts : il n’a qu’à se servir, on ne lui donne jamais rien à parcourir. Le moindre jeu de construction, pourvu qu’il ne soit pas trop raffiné, implique un apprentissage du monde bien différent : l’enfant n’y crée nullement des objets significatifs, il lui importe peu qu’ils aient un nom d’adulte : ce qu’il exerce, ce n’est pas un usage, c’est une démiurgie : il crée des formes qui marchent, qui roulent, il crée une vie, non une propriété ; les objets s’y conduisent eux-mêmes, ils n’y sont plus une matièreinerte et compliquée dans le creux de la main. Mais cela est plus rare : le jouet français est d’ordinaire un jouet d’imitation, il veut faire des enfants usagers, non des enfants créateurs.

L'embourgeoisement du jouet ne se reconnaît pas seulement à ses formes, toutes fonctionnelles, mais aussi à sa substance. Les jouets courants sont d'une matière ingrate, produits d'une chimie, non d'une nature. Beaucoup sont maintenant moulés dans des pâtes compliquées : la matiè plastique y a une apparence à la fois grossière et hygiénique, elle éteint le plaisir, la douceur, l’humanité du toucher. Un signe consternant, c'est la disparition progressive du bois, matière pourtant idéale par sa fermeté et sa tendreur, la chaleur naturelle de son contact ; le bois ôte, de toute forme qu'il soutient, la blessure des angles trop vifs, le froid chimique du métal ; lorsque l'enfant le manie et le cogne, il ne vibre ni ne grince ; il a un son sourd et net à la fois ; c'est une substance familière et poétique, qui laisse l'enfant dans une continuité de contact avec l'arbre, la table, le plancher. Le bois ne blesse, ni ne se détraque ; il ne se casse pas, il s'use, peut durer longtemps, vivre avec l'enfant, modifier peu à peu les rapports de l'objet et de la main ; s'il meurt, c'est en diminuant, non en se gonflant, comme ces jouets mécaniques qui disparaissent sous la hernie d'un ressort détraqué. Le bois fait des objets essentiels, des objets de toujours. Or il n'y a presque plus de ces jouets en bois, de ces bergeries vosgiennes, possibles, il est vrai, dans un temps d'artisanat. Le jouet est désormais chimique, de substance et de couleur : son matériau même introduit à une cénesthésie de l'usage, non du plaisir. Ces jouets meurent d'ailleurs très vite, et une fois morts, ils n'ont pour l'enfant aucune vie posthume.

 

Roland Barthes, Mythologies

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